Français d'adoption

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Bo Hellberg, Suédois, DC de Megalo Company nous livre sa vision de la création française. Dans le mag de février, nous avons demandé à quelques directeurs de création étrangers comment ils voyaient la création française de l'intérieur. Vue la richesse de leurs réponses, nous avons décidé de publier leurs contributions dans leur intégralité.





Le premier à prendre la parole est Bo Hellberg, Suédois, Dc de Megalo Company. Il a étudié à Mexico D.F, a travaillé en Suède, en Australie, en Espagne, au UK et maintenant en France, chez Megalo Company, après avoir officié chez Tribl DDB puis DDB Paris.

 

Au vue de votre expérience internationale, quelles sont les particularités culturelles de la création en France ?

Les Français sont probablement le peuple le plus traditionnel avec qui j'ai travaillé. Vous bossez dur et dans les règles de l’art. Vous aimez les vieilles manières et les relations d’affaires. Vous êtes fiers d’être Français. Ce qui est un avantage, ou pas...



Vous aimez la "créa" et êtes très sensibles aux belles exécutions, comme les films superbement réalisés. Vous êtes attentifs aux moindres détails. Et vous allez passer des heures à peaufiner vos créations. Votre maîtrise de l'exécution est incontestable. Mais... où est l'idée ? Il est fascinant de constater à quel point l’approche publicitaire est intellectualisée dans les agences françaises, à grand renfort de références culturelles, littéraires ou autres, alors que dans les autres pays, c’est l’idée, l’insight qui prime. D’ailleurs, en Angleterre ou en Suède, l’approche est beaucoup plus pragmatique. Du coup, les idées sont exprimées plus simplement.



 

En quoi cela diffère-t-il de votre pays d'origine ?

Les agences françaises travaillent beaucoup en silos, par département (médias, PR, Numérique, DM), or le numérique a bouleversé cette donne et toutes les expertises doivent être aujourd’hui profondément intégrées. Et cela se reflète dans les prix internationaux. Ce ne sont pas les exécutions cloisonnées qui gagnent les grands prix, mais les bons insights et l’innovation.



Autre particularité, l’importance des relations et de la cooptation de manière générale, au détriment de la méritocratie. Ce qui est sympa quand on s’appelle Maurice, mais moins sympa quand on est une petite structure. En Suède par exemple, de petites agences comme Forsman & Bodenfors arrivent à gérer des comptes internationaux, des clients mondiaux, même sans réseau.



 

Pourquoi on ne produit pas de campagnes pouvant rapporter un Lion Integrated ou un Titanium à Cannes ?

Ce n’est pas une question de talent, mais de manque de mixité, de mélange de cultures. En France, les agences travaillent avec des Français pour des marques françaises. Ce qui n’aide pas à être reconnu sur le plan international. Pour trouver une idée internationale, il faut un mélange des genres.



La passion, l’amour du métier ne suffisent pas. Il faut pousser les clients à penser en dehors des silos, et à passer plus de temps à travailler sur les idées et les insights de consommation. En somme, travailler plus comme des étrangers et avec des étrangers. Voilà une façon de gagner des prix à Cannes.

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