France Télévisions va tester la pub après 20h... en régions

Profitant d’une brèche dans la loi qui interdit la publicité en soirée sur les chaînes publiques, France Télévisions va remettre des spots après 20H00 sur France 3 dans quelques régions, une initiative inattendue qui a surpris même les syndicats. Dès octobre, a précisé mardi un porte-parole de France TV, le groupe public proposera des écrans publicitaires d’une minute à 20H10 dans quatre régions, et pourrait monter à 4 minutes en cas de succès commercial. Ce créneau pourrait lui rapporter 10 millions d’euros de recettes par an, a expliqué le président du groupe, Rémy Pflimlin, aux élus du personnel lors d’un comité d’entreprise mardi, ont rapporté le porte-parole et les syndicats. De quoi compenser un peu l’érosion des recettes publicitaires du groupe qui ont baissé de 4 % au premier semestre, a souligné FO, un des syndicats les plus favorables au retour de la publicité en soirée sur les chaînes publiques. La loi du 5 mars 2009 n’interdit que les publicités au niveau national, a fait valoir France Télévisions. Pour mettre en place des publicités régionales en soirée, le groupe a dû surmonter une difficulté technique : permettre un décrochage régional sur les 24 antennes exactement au même instant, alors que le programme de France 3 est à cette heure-là identique pour tous. À l’heure choisie, les téléspectateurs des régions concernées verront un spot publicitaire régional, tandis que les autres verront un "comblement", par exemple une autopromotion de la chaîne. C’est la première fois que le groupe public, dont les recettes pâtissent depuis plusieurs années de la chute du marché publicitaire, réussit à trouver un moyen d’accroître cette ressource depuis la loi de 2009.

Le ministère sans voix

Interrogé mardi en fin de journée, le ministère de la Culture, visiblement pris de court, n’avait pas encore réagi. La pression sur France Télévisions est particulièrement forte pour 2015, année où le groupe a pour objectif de revenir à l’équilibre. France Télévisions ne connaît pas encore son budget pour l’an prochain, objet d’arbitrages interministériels, ni le montant de la redevance audiovisuelle, sa principale ressource. - 420 millions manquants - En cette période de disette, "France Télévisions estime important de mener une expérimentation pour voir s’il existe une demande pour des écrans publicitaires régionaux", a déclaré le porte-parole. Rémy Pflimlin a plusieurs fois réclamé le retour des publicités en soirée sur les chaînes publiques mais sa demande semblait devoir rester un vœu pieux, bloqué par la loi. Sans s’engager, la ministre de la Culture, Fleur Pellerin, a jugé, début septembre, que ce sujet n’était "pas un tabou absolu" mais que la question ne se posait pas "dans l’immédiat". Plus négatif encore, Olivier Schrameck, président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), qui a sur ce sujet un avis consultatif, avait réitéré lundi sur France Inter son opposition à un retour de la publicité sur France Télévisions en soirée, craignant un déséquilibre du marché publicitaire. 

Les syndicats surpris

Depuis la suppression de la publicité en soirée à France Télévisions en 2009, l’Etat a accru ses dotations au groupe, mais sans compenser entièrement le manque à gagner, selon FO, qui dénonce un "budget manquant de 420 millions d’euros". Les syndicats du groupe ont tous aussi été surpris par l’annonce de Rémy Pflimlin mardi. "Il faut le retour de la publicité sur France Télévisions, et vite, c’est urgent ! Nous n’avons pas le luxe de faire autrement", a applaudi FO. "S’apercevoir en 2014 que c’était permis depuis 2009, c’est consternant. C’est lamentable et dramatique alors que nous sommes une entreprise en situation de quasi-faillite. Si ce n’était pas interdit, pourquoi ne l’a-t-on pas fait avant ? C’est proprement aberrant", s’est étonné Jean-Jacques Cordival (SNPA-CGC Médias). Peu enthousiaste, Antoine Chuzeville (SNJ) a noté que "cela rapportera peut-être plusieurs millions d’euros" mais a dit "préférer une extension de la redevance, qui rapporterait plus d’argent et ne rognerait pas sur le temps d’antenne".

À lire aussi

Filtrer par