Loi sur le secret des affaires : des journalistes écrivent à Emmanuel Macron

Plus d'une centaine de rédactions, d'ONG et de journalistes ont interpellé Emmanuel Macron pour qu'il modifie la proposition de loi sur le secret des affaires, "un outil de censure inédit" selon une lettre ouverte publiée mercredi, à la veille de son vote définitif à l'Assemblée nationale. "Désormais, la loi donnera aux entreprises le pouvoir de poursuivre tous ceux qui oseront révéler des informations sensibles dans l'intérêt général. Pis, avant même toute publication, elle réinstaurera une forme de censure a priori du juge, abolie en 1881 par la loi sur la liberté de la presse", regrette le collectif "Stop secret des affaires" dans cette lettre publiée dans Libération. "Entre les mains de vos députés, cette loi constitue un outil de censure inédit. C'est une attaque sans précédent contre le droit d'informer ainsi que le droit d'être informé de manière libre et indépendante", déplorent les signataires, parmi lesquels une quarantaine de sociétés de journalistes ou de rédacteurs (dont celle de l'AFP), une trentaine d'ONG et de syndicats et une soixantaine de signatures individuelles (journalistes, producteurs et avocats). "La procédure parlementaire n'ayant permis aucun débat public digne de ce nom, ni aucune concertation entre les partenaires sociaux, vous êtes, avec le Premier ministre, le seul à pouvoir changer le contenu de cette loi", écrivent-ils au président de la République. "Si comme nous, vous considérez la liberté d'informer comme un pilier de la démocratie ; si comme nous, vous êtes attaché à l'équilibre des pouvoirs et à la défense l'intérêt général, vous devez modifier cette loi. Vous devez limiter le champ d'application du secret des affaires aux seuls acteurs économiques concurrentiels", poursuivent-ils.

La proposition de loi LREM, qui transpose une directive européenne, fait l'objet de vifs débats depuis plusieurs mois, médias et ONG demandant à ce que les lanceurs d'alerte, les syndicalistes ou les journalistes en soient exclus. En l'état actuel, "les lanceurs d'alerte seront systématiquement traînés en justice, avant même de pouvoir faire la preuve de leur bonne foi. Les représentants du personnel pourront être poursuivis pour avoir diffusé des informations aux salariés. Les ONG devront démontrer qu'elles agissent pour le bien commun. Et les organes de presse pourront être assignés devant des tribunaux de commerce", énumère la lettre ouverte. Le texte sera voté une dernière fois par l'Assemblée nationale le 14 juin, puis par le Sénat le 21 juin.

À lire aussi

Filtrer par