Faïza Rabah (OMG France) : « Le sujet de l’attention est en fait un sujet d’inattention »

Faiza Rabah Havas Media

Sept questions sur l’attention publicitaire à Faïza Rabah, directrice marketing science chez Omnicom Media Group France.

Faïza Rabah a pris la direction du pôle Marketing Science chez OMG France en septembre 2024. Ce département, spécialisé dans la recherche et l’analyse des données, vient en soutien des agences du Groupe avec l’apport d’insights relatifs aux évolutions des comportements des consommateurs. Elle dirigeait précédemment le pôle études de Havas Media, de 2019 à 2024, après 14 années au sein du Groupe M6 où elle était notamment cheffe de groupe marketing.

CB News : Comment définissez-vous l’attention publicitaire ?

Faïza Rabah : En tant que participante et représentante de l’UDECAM au sein du groupe de travail expert sur l’attention piloté par le CESP et l’IREP, j’adhère complètement à la définition retenue, que je rappelle : « dans un environnement donné, l’attention est le fait pour un individu de fixer son esprit sur un ou plusieurs des éléments d’un message publicitaire. » L’attention publicitaire est un critère de la qualité du contact publicitaire. Cependant, je suis convaincue que ce n’est pas une fin en soi. C’est un ingrédient parmi d’autres dans l’efficacité d’une campagne. En effet, l’indicateur de l’attention est davantage utilisé comme un indicateur de contrôle, en complément des indicateurs de performances médias traditionnels comme les GRP, les impressions, la couverture…

CB News : Avez-vous un ou des indicateurs de préférence pour rendre compte de cette attention ?

Faïza Rabah : Comme je le disais, l’indicateur de l’attention est avant tout utilisé comme un indicateur de contrôle. Ce qui est intéressant c’est de parler de l’efficacité de l’attention. A ce titre, l’indicateur que nous privilégions chez Omnicom Media Group est la mémorisation, qui va au-delà des indicateurs classiques de l’attention basés sur une durée. Ils ne sont pas suffisants pour exprimer une notion d’efficacité. Notre rôle, en agence média, est de déterminer pour nos clients le set des KPIs qui constitueront les signaux d’une attention avérée, dont la mémorisation fait partie.

CB News : Quelles solutions mettre en œuvre collectivement pour améliorer l’attention publicitaire ?

Faïza Rabah : En tant qu’agence média, notre raison d’être est de créer les conditions pour susciter l’attention des audiences sur les messages publicitaires de nos clients. La collaboration entre l’agence média et l’agence de création est aussi un facteur de succès. Créa et media sont interconnectés.

Nous constatons aussi une prise de conscience de la part des médias, comme certaines régies publicitaire radio, qui n’hésitent plus à mettre en avant une promesse du « moins mais mieux » en réduisant la pression publicitaire pour favoriser l’émergence dans un contexte d’encombrement.

CB News : Le sujet de l’attention est-il lié à la question des formats publicitaires intrusifs ?

Faïza Rabah : Le sujet de l’attention est en fait un sujet d’inattention. Il a été amplifié sur le digital qui connaît une explosion de contenus et une prolifération de formats publicitaires avec des degrés de qualité différents. Dans ce cadre, l’attention joue alors le rôle d’un proxy qui permet de faire la curation des inventaires sur un critère qualitatif et nous permet surtout de nous assurer que les impressions publicitaires aient bien été délivrées.

D’ailleurs, on peut imaginer que l’attention remplace la visibilité sur le digital, à condition qu’un standard soit établi à l’échelle internationale. En attendant et en tant qu’agence média, nous avons une exigence de qualité vis-à-vis de nos clients quant aux inventaires sélectionnés.

CB News : Comment rendre les formats pub moins intrusifs ? Par quoi commencer ?

Faïza Rabah : Il faut distinguer le contenu et le contenant. Le message joue évidemment un rôle essentiel mais le contexte dans lequel il est diffusé et l’UX publicitaire du support jouent un rôle majeur. Une publicité qui n’est pas annoncée et qui vient couper de manière impromptue un programme sera perçue comme intrusive. Pour empêcher les consommateurs de mettre en place des stratégies d’évitement, comme l’installation d’ad blocker, il faut une publicité bien intégrée et en harmonie avec le média d’accueil.  

CB News : Pour un annonceur, la personnalisation est-elle la solution pour capter l’attention ?

Faïza Rabah : Pour capter l’attention, il faut sortir du lot en investissant davantage sur la marque. La personnalisation en fait partie mais pas seulement. Cela peut passer par installer de nouveaux codes ou casser les codes de sa catégorie, privilégier des formats longs et faire preuve d’originalité à travers des opérations spéciales de brand content par exemple.

A titre d’illustration, je trouve que les campagnes de lancement de la Renault 5 E-TECH 100% électrique ont été particulièrement impactantes et cela est confirmé par les chiffres que nous suivons.

CB News : Le sujet de l’attention est-il avant tout un sujet de création publicitaire ?

Faïza Rabah : De nombreuses études (Kantar, Ipsos, Nielsen…) ont démontré que la création est le levier n°1 de l’efficacité publicitaire avec le reach. L’attention s’appréhende à travers plusieurs dimensions. Il faut s’assurer de toucher les bonnes cibles avec les bonnes créations dans les meilleurs contextes et au bon moment. C’est grâce au savant dosage de tous ces éléments que les consommateurs seront attentifs aux messages des annonceurs.

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