Gaëlle Legris (Agence Leon): "Cette période a vu un temps le fond terrasser la forme"

 Gaëlle Legris

Le confinement, ce n'est pas fini. Et les interviews matinales de CB News non plus. Rendez-vous avec Gaëlle Legris,  co-fondatrice  de l'Agence Leon

7 ème semaine de confinement et de télétravail… Après la mise en place d’une nouvelle organisation, comment se déroule l’activité de votre entreprise ?

Après avoir été fortement impactée dans les deux premières semaines suivant les mesures de confinement - qu’il s’agisse de suspension de collaboration pour nos clients les plus fragilisés, ou de report sine die de compétitions d’agences sur lesquelles nous misions fortement - je dirais que notre activité se stabilise. Une stabilité que nous avons finalement paradoxalement un peu de mal à gérer, en ce que les 5 années d’existence de l’agence ont toujours été très intenses, très rythmées, et riches de nouveaux projets permanents ! Nous trouvons donc un rythme, des process, toutes ensemble, qui doivent nous permettre d’être efficaces, tout en restant extrêmement positives, alertes au moindre signal encourageant, à l’affut de la moindre opportunité de rebond… Ces opportunités se font par ailleurs plus nombreuses depuis l’annonce de la perspective du 11 mai prochain. Nos clients semblent retrouver confiance et envie, et des initiatives stoppées net reviennent à l’ordre du jour, particulièrement dans l’écosystème startups que nous accompagnons.

Quelles sont les urgences de vos clients ? Que vous demandent-ils ? Quelles sont vos préconisations ?

Ce qui a véritablement changé, pour combien de temps je l’ignore, c’est la notion même d’urgence. Si l’impatience de reprendre un rythme classique de communication se fait naturellement sentir, ce temps est aussi un vrai temps d’écoute : d’écoute de leur agence bien-sûr (je ne ferais que paraphraser mes confrères et consœurs en insistant sur la prédominance de la valeur conseil actuellement), mais aussi (et c’est tout aussi fondamental), d’écoute des médias, et des attentes journalistiques. Nos clients nous demandent ce que veulent les journalistes, quelles informations ils recherchent et comment ils pourraient aujourd’hui leur être utiles au regard de leur savoir-faire : une question fondamentale qui devrait toujours être à l’origine d’une démarche de relations médias. Nous travaillons donc avec eux à mobiliser les bonnes expertises, ou encore les contenus les plus pertinents, au bon moment.

Y aura-t-il un avant et un après coronavirus pour votre entreprise ? Pour votre secteur ?

Indéniablement. Cette crise nous a toutes et tous questionné sur le sens profond d’un métier qui peut être tout autant passionnant que prenant. Mon associée Marianne Felce-Dachez et moi-même avons bien entendu douté, tout comme j’en suis persuadée chacun des membres de l’équipe. J’espère sincèrement qu’elles ont comme nous trouvé leurs réponses dans la puissance des relations clients qu’il nous a été permis de nouer jusqu’ici.  Cet après, nous le construirons avec elles, avec sans doute une meilleure organisation logistique qui puisse se prêter à la distance physique, une sélection encore plus drastique de nos clients et partenaires, en ce que nous savon désormais que seule une relation de confiance et de bienveillance permet de traverser de telles épreuves, des responsabilités et compétences nouvelles pour celles qui le souhaitent… Par ailleurs, nos secteurs de prédilection vont naturellement évoluer. Nous avions développé petit à petit une expertise sur l’univers des nouvelles mobilités, ou autour de l’évènementiel par exemple, qui risque de s’affaiblir, tandis que notre savoir-faire historique en termes d’accompagnement des entreprises socialement innovantes devrait lui être un atout pour la suite. Concernant le secteur des relations publics, je n’y crois pas malheureusement. Sans doute la pédagogie métier autour du « bon message, au bon moment, à la bonne personne » se sera-t-elle légèrement renforcée durant cette période, sans doute également le secteur bénéficiera-t-il d’un regain d’intérêt lié au report d’investissements publicitaires (à l’instar de la crise de 2008), mais c’est à peu près tout. Ce que l’on peut redouter en revanche, c’est l’émergence des agences nouvellement « expertes en communication responsable »… Et toutes les approximations que cela va entraîner…

Y a-t-il d’ores et déjà des leçons que l’on peut tirer de cette période ?

Il semblerait que la crise sanitaire, et in fine, économique et sociale que nous traversons, pousse tout un chacun à une nouvelle introspection. Nous n’y échappons évidemment pas. En tant qu’entrepreneure, je dirais que la principale leçon à tirer est de ne jamais, sous aucun prétexte, perdre de vue la raison initiale qui nous a poussé à entreprendre. A l’époque, elle était évidente, naïve, instinctive, animale, et c’était donc la meilleure des raisons ! L’avoir conservé en mémoire dans chacune des étapes franchies et des décisions prises par le passé nous aide aujourd’hui à ne pas paniquer, à capitaliser sur nos acquis, et à avoir confiance en l’avenir.En tant que professionnelles des RP, osons dire que cette période a vu un temps le fond terrasser la forme, l’expertise concrète, humble et mesurée surpasser les effets d’annonce… Pourvu que ça dure !

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