Cannes Lions 2025 : “Une perfusion d’inspiration”, pour Matthieu Bouilhot (BETC)

CB News : La France remporte son premier Grand Prix des Cannes Lions 2025 en Outdoor pour la campagne de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques. Qu'avez-vous pensé de cette campagne ?

Matthieu Bouilhot : Je n’ai pas pu participer au débat sur cette campagne, en tant que français, et de BETC. Mon avis est qu'elle incarne le mouvement des petites communautés qui “fight back”. Ce n’est pas de l’antitrumpisme, mais l’incarnation de valeurs qui sont l'inclusivité, le respect, l’universalité et surtout la tolérance. Ce n’est pas nouveau à Cannes. Mais nous avons plutôt l'habitude de voir ces incarnations ailleurs qu’en Outdoor. Désormais, les catégories classiques s’y mettent également.

CB News : Comment se sont déroulés vos trois jours de débat ?

Matthieu Bouilhot : Les trois jours ont été intenses. Le deuxième jour, nous avons fini vers 23h, le Palais avait déjà fermé son entrée principale. Le premier jour a servi à nettoyer la sélection, le deuxième jour à trouver notre shortlist, puis le troisième à se décider sur les récompenses. Certaines campagnes se démarquent dès le départ comme KitKat (ndlr : Grand Prix Outdoor aussi), nous savions dès le début qu’elle partirait avec quelque chose.

CB News : Avez-vous eu des divergences ?

Matthieu Bouilhot : Nous avons eu beaucoup de débats. Les points de vue sont différents, mais nous pouvions trouver des terrains d’entente. Comme pour une campagne Burger King où l'on voit une mère dans la salle d’accouchement avec son bébé dans les bras et dans l’autre main un burger. Certains ont pensé, comme c’est mon cas, que la publicité ne doit pas envahir tous les espaces de la vie. Une autre partie des jurés a pensé que la campagne était à contre-courant de toutes les injonctions faites aux femmes enceintes. Une célébration de “une femme enceinte fait ce qu’elle veut”. La campagne oscillait entre un Bronze et un Gold, elle a finalement eu un Silver.

CB News : Quelles tendances avez-vous relevées ?

Matthieu Bouilhot : Il y a eu beaucoup de très bonnes campagnes. Les Cannes Lions nous demandent par exemple de retenir en shortlist 10% des entrées, alors que 15% méritent d’y être. Dans l’Outdoor classique, il y a une tendance importante de l'hyper minimalisme. Nous avons vu beaucoup de campagnes sans logo ou sans texte. Comment l’expliquez vous ? Il y a une bataille pour l’attention partout. Les campagnes vont appuyer sur les produits, le prix et la marque. Certaines en haut du panier font tout l’inverse. KitKat est le parfait exemple avec sa campagne “Crowd”. La personne qui regarde l’affiche doit faire son chemin jusqu’à l’idée.

CB News : D’autres tendances ?

Matthieu Bouilhot : Beaucoup de bière. Il y a par exemple eu près de 40 propositions de la marque Corona. Ces marques font d’excellentes campagnes. Il y a par exemple la marque de bière Tekate qui a placé un bateau bar dans le Golfe du Mexique, appelé Golfe du Mexique et épinglé sur la carte de Google Maps (ndlr : en opposition de l'appellation Golfe d’Amérique voulue par Donald Trump) ou encore une campagne de Stella qui était en lice pour remporter un Grand Prix face à celle de KitKat.

CB News : Qu’est-ce qui a fait pencher la balance ?

Matthieu Bouilhot : Les Cannes Lions nous demandent de ne pas comparer les campagnes entre elles. Plus on avance, plus nous avons un entonnoir et cela se complique. La campagne Stella est le parfait exemple de ce que nous pouvons faire dans l’Outdoor classique avec un visuel très réussi et une stratégie solide. De l’autre côté, Kitkat propose une approche originale, puissante et un regard sur la société.

CB News : Plus personnellement, comment avez-vous appréhendé votre rôle de juré ?

Matthieu Bouilhot : J’adore mon métier. Je suis complètement obsessionnel. Pendant 3 jours de débat avec les autres membres du jury, j’ai été au cœur du réacteur. Je repars de là avec un boost d’énergie. Être entouré par des experts venus de cultures et de pays différents… Je repars de là avec une perfusion d’inspiration.