Droit voisin : les éditeurs de presse gagnent contre Google

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Les éditeurs de presse ont marqué jeudi un point juridique en France face à Google dans leur bataille pour obtenir du géant internet américain "le paiement de droits voisins" qui puissent rémunérer les contenus de presse repris par Google sur ses pages. Dans un arrêt très attendu, au-delà des frontières de la France, la cour d'appel de Paris a jugé que l'Autorité de la concurrence française était bien fondée le 9 avril à obliger Google à engager des négociations sur ces droits voisins avec les éditeurs de presse. La cour qui a rejeté le recours de Google a condamné la société à payer une somme de "20.000 euros chacun" aux trois représentants des éditeurs de presse impliqués --l'Alliance de la presse d'information générale (APIG), le Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) et l'AFP--, selon le texte de l'arrêt dont l'AFP a eu connaissance. Les "droits voisins" prévoient une rémunération pour les contenus (photos et vidéos notamment) utilisés par les plateformes en ligne. Mais Google avait refusé d'emblée de payer la presse française, déclenchant un bras de fer avec le secteur.

C'est "une décision très importante. La concurrence s'applique à tous, y compris dans le numérique", s'est félicitée dans un tweet la présidente de l'Autorité de la concurrence, Isabelle de Silva. Google de son côté a pris acte de la décision de la cour d'appel. "Nous avions fait appel afin d'avoir davantage de clarté juridique sur certains éléments de la décision et nous sommes en train de prendre connaissance de l'arrêt de la cour d'appel", a indiqué le géant américain dans un communiqué.  "Notre priorité demeure l'aboutissement de nos discussions avec les éditeurs et les agences de presse français" sur la question de la rémunération des contenus, a-t-il ajouté. Cette validation juridique est la bienvenue pour les éditeurs de presse, dans un domaine qui demeure encore relativement vierge, puisque les droits voisins en la matière résultent d'une législation européenne adoptée en 2019 et immédiatement mise en application par la France. "Forte de l'arrêt de la cour d'appel, l'AFP émet le vœu que les discussions puissent désormais se dérouler sur les bases et selon les conditions fixées par la loi", a ainsi souligné l'agence dans un communiqué.

Formation d'un groupe de négociateurs

Dans les faits, le processus de négociation imposé par l'Autorité de la concurrence avait trouvé ces derniers jours une certaine validation, puisque Google a annoncé lui-même mercredi soir être proche d'un accord sur les droits voisins avec l'une des parties concernées côté presse, l'APIG. Un "groupe de négociateurs" a été "chargé de finaliser les détails d'un accord-cadre", a indiqué à l'AFP Pierre Louette, PDG du groupe Les Échos-Le

Parisien et nouveau président de l'Apig, qui regroupe notamment les éditeurs de quotidiens nationaux et régionaux. Ils devront notamment préciser "l'articulation entre la rémunération des droits voisins, et News Showcase", un nouveau programme de rémunération de contenus tout récemment dévoilé par le géant américain, a-t-il ajouté. Le groupe américain espère parvenir également à un accord avec les deux autres parties, le Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) et l'AFP.

Au-delà de la France et de l'Europe, la question de la rémunération des contenus de presse par les plates-formes se pose sur toute la planète :  l’Australie veut par exemple obliger Google et Facebook à rémunérer ses médias locaux. La semaine passée, le président de Google Sundar Pichai avait annoncé une dépense d'un milliard de dollars pour améliorer les revenus des éditeurs de presse dans le monde via le paiement de licences. Selon Google, cette nouvelle proposition fait partie de ce qui a été mis sur la table pendant les discussions avec les éditeurs français sur les droits voisins. La décision de la cour d'appel de Paris "pourra avoir un effet sur d'autres acteurs internet" que Google "et dans d'autres pays", y compris au-delà de l'Union européenne, a estimé jeudi l'avocate spécialisée dans le numérique Christiane Féral-Schuhl. "C'est peut-être la première marche vers un nouveau partage de l'économie sur internet", a-t-elle déclaré à l'AFP.

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