Fake News : les pistes de travail de la commissaire européenne au Numérique

Il est nécessaire de "redoubler d'efforts" contre la désinformation en ligne pendant les périodes électorales, plaide la commissaire européenne au Numérique, Mariya Gabriel, dans un entretien à l'AFP. Mme Gabriel, 38 ans, la benjamine de la commission européenne, doit présenter le 25 avril des premières pistes pour mieux traquer les "fake news" au niveau européen. Un dossier hautement débattu après que l'Allemagne a légiféré l'été dernier pour lutter contre la désinformation sur les réseaux sociaux et que la France s'apprête à présenter "dans quelques semaines" une proposition dans le même sens. "C'est justement à l'occasion d'élections que nous nous sommes rendus compte à quel point ce phénomène peut avoir des conséquences sur le choix des électeurs", a expliqué la commissaire bulgare, qui a récupéré le portefeuille du numérique en juillet dernier, après le départ de sa compatriote Kristalina Georgieva pour la Banque Mondiale. "Nous recevons le message qu'en période électorale, il y a nécessité vraiment de redoubler d'efforts. Au moment du dévoilement de notre communication en avril, nous n'allons pas omettre cet aspect-là", a souligné cette diplômée de Sciences Po Bordeaux, parfaitement francophone. Pour élaborer ses premières recommandations - qui ne sont pas des propositions législatives, insiste-t-elle -, Mme Gabriel doit notamment se baser sur un rapport public qui lui sera officiellement remis ce lundi par un groupe d'experts. Ce groupe de travail, qu'elle a mis sur pied, comprend des représentants de grands médias européens (RTL, Mediaset, Sky News), de la société civile (RSF) et des géants technologiques (Facebook, Twitter et Google), des universitaires ainsi que des journalistes, comme le responsable des réseaux sociaux à la rédaction en chef de l'AFP, Grégoire Lemarchand. À l'expression "fake news", Mme Gabriel préfère d'ailleurs le terme de "désinformation en ligne". "Car nous connaissons aujourd'hui les effets pervers de l'utilisation de l'expression +fake news+ qui pourrait servir à des politiques pour décrédibiliser leurs adversaires et nuire à la liberté d'expression", reconnaît-elle.

Un plan d'éducation aux médias pour la jeunesse

Interrogée pour savoir si la Russie, régulièrement pointée du doigt, était dans le collimateur de l'UE, Mme Gabriel a estimé qu'"il n'y a pas un seul coupable, un seul modèle responsable". À la mi-janvier, la Commission européenne avait accusé Moscou de conduire une campagne de désinformation "orchestrée" dans les pays de l'UE, constatant que celle-ci pouvait "être extrêmement efficace". Ainsi, la chaîne de télévision RT et l'agence de presse russe Sputnik, deux médias publics russes en langues étrangères, sont-elles accusées en Europe et aux Etats-Unis de relayer la propagande du Kremlin, voire de tenter d'interférer dans des élections, comme lors de la campagne présidentielle de 2017 en France. Le projet de loi annoncé début janvier par le président français Emmanuel Macron pour combattre les fausses informations prévoit que les obligations de transparence des plateformes numériques des géants du net soient renforcées durant "les périodes pré-électorales et électorales". Pour Mme Gabriel, ce qui importe avant tout, c'est la "nécessité de transparence qui permet d'identifier les sources". "Par exemple, en période électorale", a-t-elle estimé, "il faut avoir une indication très claire sur ce qui est payé par un parti politique, il faut pouvoir montrer clairement aux citoyens que cela fait partie d'une campagne intentionnelle". Mariya Gabriel prône également un plan d'éducation aux médias pour la jeunesse, à l'instar de celui lancé par la ministre française de la Culture, Françoise Nyssen. "Aujourd'hui, c'est une urgence. Le mot clé, c'est l'éducation. L'éducation aux médias doit faire partie du parcours de nos universités, de nos écoles", a expliqué la commissaire bulgare. "Pour cela, il faut aussi faire attention aux enseignants, on n'y pense pas assez souvent", observe cette passionnée d'histoire. Pour Mme Gabriel, "les jeunes ont beaucoup d'instruments, beaucoup de moyens à leur disposition (...) mais c'est vraiment les enseignants qui ont besoin de maîtriser cette technologie pour pouvoir le transmettre aux jeunes". (avec l’AFP)

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