Amazon Fresh : en attendant son arrivée la distribution alimentaire s'organise

La grande distribution alimentaire serait-elle au pied du mur avant l’arrivée d’Amazon Fresh ?  C'est la question à laquelle répond Xerfi-Precepta dans son étude "Les enjeux et stratégies dans le e-commerce alimentaire - Livraison express, drives urbains, investissements logistiques, alliances stratégiques… : bouleversement du jeu concurrentiel et nouveaux leviers de croissance pour les distributeurs" (auteur Delphine David).

Etat des lieux

Sur un marché alimentaire morose (moins de 2% par an entre 2010 et 2018), les ventes en ligne de produits de grande consommation (PGC) et de frais libre-service (FLS) ont bondi de 15% par an en moyenne sur la période. Et les perspectives s’annoncent encourageantes. Et pour cause. Le e-commerce représente à peine plus de 6% des ventes totales de PGC et FLS. En clair, l’alimentaire est l’un des marchés de grande consommation les plus embryonnaires sur internet. Une fois ces chiffres posés, le e-commerce alimentaire (drive et livraison) devrait progresser de 10% par an en moyenne à l’horizon 2021 pour représenter près de 8% des ventes totales selon les prévisions de Xerfi Precepta. Les offensives des nouveaux acteurs du web sur les circuits courts et la livraison de petits commerces de bouche accentuera le poids de l’alimentaire dans les dépenses des consommateurs sur internet. Mais le développement des sites marchands des géants de la distribution alimentaire sera le principal vecteur de la croissance. Souvent évoqué et pour l’instant toujours dans les cartons, l’arrivée du supermarché Amazon Fresh en France pourrait accélérer la montée en puissance du e-commerce alimentaire. Les distributeurs s'organisent notamment sur le terrain bataillé de la livraison. Elle impose cependant une logistique complexe et coûteuse avec des services toujours plus performants alors que le consommateur rechigne à payer. A l'avenir la livrason sera encore plus complexe avec la mise en place d’une taxe pour les livraisons liées au e-commerce. Une taxe inscrite dans la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs ainsi que dans le projet de loi de finances pour 2019. Que cette taxe soit votée ou non, le potentiel du e-commerce alimentaire est suffisamment important pour qu’un nombre croissant d’acteurs se lancent dans la vente en ligne. Les plateformes numériques organisent ainsi les circuits courts, à l’image de La Ruche qui dit Oui ! par exemple. Une nouvelle génération de start-up se fraye également son chemin pour connecter consommateurs et producteurs au-delà d’une sphère locale, comme la marketplace Pourdebon. Certains pure players ont également trouvé leur place grâce à des stratégies de niche (comme l’épicerie fine pour Bienmanger) ou des services innovants (tels que les kits prêts à cuisiner de Quitoque, désormais dans le giron de Carrefour). L'étude dévoile que même s’il peut parfois se révéler compliqué (organisation et facturations de la préparation de commandes), le drive présente l’avantage de laisser le coût du dernier kilomètre à la charge du client. 

La menace Amazon Fresh

Mais c’est l’arrivée d’Amazon Fresh sur le marché français qui bousculera les positions actuelles. A commencer par celle d’E.Leclerc (leader sur le drive) qui n’en est qu’au début de sa stratégie de conquête des centres urbains. Notamment avec E.Leclerc Chez Vous à Paris en 2018. D’autres sont en revanche plus avancées sur ce terrain. C’est notamment le cas du groupe Casino avec ses enseignes Franprix, Monoprix et Cdiscount. Quant à Carrefour, il commence seulement à connecter son important réseau de supérettes à son site marchand. Pour contrer la menace Amazon, certains géants français de la distribution ont rejoint l’écosystème concurrent de Google, voire ont noué un partenariat avec le groupe américain (Carrefour). A tel point qu’une ligne de fracture pourrait se dessiner entre les distributeurs « pro-Google » et les distributeurs « pro-Amazon ». Mais ils seraient bien inspirés de ne pas seulement focaliser leur attention sur les deux géants d’outre-Atlantique. Le marché de la livraison des petits commerces de proximité pourrait bel et bien se structurer à l’initiative des puissantes plateformes de livraison de restaurants (Uber Eats, Deliveroo…) ou d’un acteur comme La Poste, déjà présent sur le marché des circuits courts (via Pourdebon) et sur celui de la livraison de repas (via Resto-In). Les groupes coopératifs agricoles sont également de puissants concurrents en devenir. Quant aux industriels de l’agroalimentaire, si les stratégies de vente directe à grande échelle ne semblent pas d’actualité, les pistes à explorer ne manquent pas. 

Bio ?

Enfin, grandes absentes du e-commerce, les enseignes bio ne pourront pas faire autrement que de se lancer dans la vente en ligne pour reprendre les parts de marché cédés aux GSA ces dernières années. La plupart accusent un retard conséquent dans le ecommerce. Elles ont engagé un vaste chantier de clarification de leurs offres en ligne pour converger peu à peu vers des portails uniques, points d’accès à un parcours multicanal.

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