World Luxury Tracking : optimisme, résilience et classicisme selon les continents

Luxe

Ipsos dévoile les résultats de son baromètre annuel des tendances de consommation du luxe : le World Luxury Tracking (WLT). Son édition 2020 (1), révèle "une véritable redéfinition du luxe sous l’effet combiné d’une digitalisation accélérée, d’un besoin d’indulgence et de bien-être qui deviennent une priorité, mais aussi lié au coût d’arrêt du travel retail qui était devenu une partie essentielle du marché" souligne les auteurs. On observe désormais "des attentes plus locales, digitales et sensorielles qui doivent être repensées, alors que l’on s’oriente vers une consommation du luxe plus fondamentale, exigeante, en quête d’épanouissement de soi." Cette dernière vague qui s’intéresse aux sept pays piliers du luxe (Chine, les USA et l’Europe avec France, Italie, Allemagne, Espagne et Grande-Bretagne,) permet d’identifier et quantifier des évolutions historiques et d’obtenir des insights sur les nouvelles contraintes et aspirations du luxe à l’ère Covid. Ci-dessous un extrait de cette étude (également disponible sous souscription)

Les points communs dans les trois continents

"Au-delà de ces dénominateurs communs que sont l’expérience de plus en plus digitale, le besoin de sensorialité et d’émotions, ainsi que la culture produit de plus en plus pointue… On observe des attitudes polarisées selon les zones : optimisme et matérialisme assumé des Affluents chinois, résilience et nouvel hédonisme des américains, refuge anti-anxiété et prudence en Europe" souligne Françoise Hernaez, Directrice Cultural Intelligence chez Ipsos.

Digital

Alors que les "Affluents" (les plus aisés selon la dénomination d'Ipsos) ont passé beaucoup plus de temps sur internet avec les marques de luxe, 70% des chinois, 51% des américains et 35% des européens ont acheté des produits de luxe en ligne pendant leur confinement et prévoient d’acheter plus de luxe en ligne (sur les sites multimarques pour 68%, les sites de marques pour 51%, les sites de seconde main en ligne pour 21%, et les réseaux sociaux pour 8% d’entre eux). Ils attendent une expérience efficace et souhaitent avant tout trouver exactement le produit recherché ; la protection des données personnelles devient une attente clé pour 86% d’entre eux.

Bien-être

Le bien-être est leur première préoccupation déclarée sur les trois zones. Le luxe participe à ce bien-être et est également associé à une sensorialité renforcée : les catégories qui proposent une expérience sensorielle ont été les plus achetées pendant le confinement, notamment les soins, parfums, vins, champagnes et spiritueux. Dans les intentions d’achats, la mode et les accessoires sont bien placés (+10 pts aux US), alors que la joaillerie et les montres représentent au global moins d’intentions d’achat dans les pays occidentaux.

Valeur ajoutée

Avec des produits authentiques et de très haute qualité, qui renforcent la confiance en soi en Chine (95% des Affluents chinois interrogés), qui leur font vivre des expériences émotionnelles exceptionnelles aux US (89% des Affluents américains) et qui représentent des investissements sûrs et de long terme en Europe (85% des Affluents européens).

Privilège

C’est le premier topic décrit dans leur définition du luxe avec leur verbatim : ils ont conscience de faire partie d’une élite sur les trois continents, ce qui est plus nouveau en Europe et aux US, alors que le plaisir de faire partie d’un cercle d’initiés était déjà une motivation traditionnelle en Chine.

LA CHINE : optimisme

Même s’ils sont impactés par la crise (45% d’entre eux ont vu leurs revenus baisser) et déclarent devoir faire des économies (+15 pts vs 2019), on observe un optimisme radical des Affluents chinois : 95% se disent confiants dans la situation économique de leur pays, dont 51% très confiants (+7pts vs 2019), un signe d’une attitude "alignée" sur un certain nationalisme, mais également enracinée dans un optimisme réel d’un grand pays dont la classe moyenne est en plein développement… Les chinois sont également plus nombreux à déclarer que le luxe est essentiel dans leur vie quotidienne (+10 pts vs 2019) et sont 49% à reconnaître qu’ils ont plus de désir de consommer du luxe qu’avant la crise. En image, ils nous partagent le plus de photos d’accessoires fashion pointus… La digitalisation dans la relation aux marques était déjà très avancée en Chine et a permis de cultiver un lien même pendant le confinement – sessions de live streaming permettant de tester des produits en compensation de la sensorialité absente des magasins, relais organisés avec des vendeurs des boutiques de luxe sur WeChat, présence des marques de luxe en ligne, jusque dans les jeux, comme Maserati partenaire du jeu Peace Elite ou Louis Vuitton avec League of Legend… des pratiques qui s’intensifient et dessinent les contours de nouveaux modes relationnels avec des clients connectés qui continuent de consommer en ligne plus que jamais et exigent également que leur parcours numériques soient fluides, intuitifs et ludiques.

Etats-Unis : résilience

Particulièrement résilients, les Affluents américains conservent une confiance élevée dans la situation économique de leur pays (94% sont confiants et les très confiants progressent de +6 pts vs 2019). Leurs revenus ont été impactés et ils vont devoir faire attention (63% d’entre eux vont essayer d’économiser, soit +11 pts vs 2019), mais on observe pourtant un attrait plus grand du Luxe et une perception renouvelée, plus cool, mais aussi plus riche en imaginaires. Le luxe est plus que jamais un espace de rêve et une échappatoire au contexte anxiogène avec une attente de créativité (+9 pts), de rêve (+7 pts) et d’innovations (+7 pts).  Pendant cette période, le luxe est devenu nettement plus important dans leur vie quotidienne (+13 pts vs 2019). Dans une culture américaine où le luxe était plus associé à des grandes occasions et des marqueurs statutaires (mariages, étapes de vie…), l’évolution socioculturelle observée à l’occasion de la crise va vers un luxe plaisir, plus sensoriel, intégré au quotidien et hédoniste : on note plus d’intérêt pour la beauté, les soins de luxe, les vins et champagnes, avec une attente forte de bien-être (au détriment de catégories traditionnelles comme les montres ou la joaillerie).  Même si les Affluents américains déclarent vouloir se recentrer sur l’essentiel, ils sont plus impliqués dans la consommation de luxe, ils font des recherches, lisent des critiques, regardent des vidéos sur YouTube, posent des questions sur les médias sociaux et téléchargent des applications, le tout généralement à partir d'un mobile. Ils s'attendent à ce que leurs expériences soient caractérisées par l'immédiateté et la commodité, mais aussi qu’on les fasse rêver.

 EUROPE : sensorialité et classicisme

Alors que les Affluents Européens se disent moins touchés au niveau de leurs revenus par la crise économique que les américains (7% seulement des Affluents européens ont connu des baisses de revenus significatives – particulièrement les jeunes), ils sont nettement plus atteints dans leur confiance dans les économies de leurs pays respectifs (-10 pts de confiance en Europe vs 2019). Seuls 45% d’entre eux sont confiants (on atteint -20 pts de confiance en France). Face à cette anxiété, ils souhaitent se réconforter avec de nouvelles expériences de luxe (cures de soins, spas, restaurants…) et s’intéressent un peu moins aux catégories traditionnelles que sont les montres ou la joaillerie. Le luxe reste important dans leur vie pour 39% d’entre eux, mais stable et les Affluents ne se disent pas plus séduits par les marques de luxe, ni moins attirés par elles... Si le bien-être est la tendance dominante en Europe, la dimension éthique progresse aussi – c’est la seule zone où les attentes sur les produits "cruelty free" et les engagements éthiques et écologiques associés au luxe continuent à progresser (+6 pts chacun). On observe enfin un profond besoin de se rassurer et une certaine aversion au changement (73% des Affluents européens ne veulent rien changer dans leurs habitude luxe) ; une tendance particulièrement portée par les boomers européens, contrairement aux chinois et aux américains plus engagés dans le changement culturellement.

(1) WLT  : chaque année environ 8 000 "Affluents" sont interrogés (de 18 - 65 ans, revenus de Top 5 à Top 20). Le WLT réunit tous les secteurs du luxe, notamment l’horlogerie, la joaillerie, la mode & accessoires, les vins & spiritueux, la beauté, parfums, soins, maquillages.

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