Challenges : les journalistes s’inquiètent de « la reprise en main idéologique » de LVMH
Les journalistes du magazine Challenges ont dénoncé mercredi dans un communiqué "une volonté de reprise en main idéologique de la rédaction" par le milliardaire Bernard Arnault, qui va racheter le titre.
Son groupe de luxe LVMH "exige la création d'une nouvelle charte (déontologique, NDLR) et une réorientation de la ligne" de Challenges, d'après le bureau de la Société des journalistes (SDJ). L'homme d'affaires Claude Perdriel, actionnaire majoritaire de Challenges, va passer la main fin décembre, à 99 ans. La vente à LVMH, pour un euro symbolique, comprend aussi les magazines Sciences et Avenir et La Recherche. M. Perdriel prévoit de renflouer encore Challenges à hauteur de trois millions d'euros. "Je crois que vous pouvez compter sur (Bernard Arnault) pour défendre le journal" économique et "suis sûr qu'il n'envisage aucun licenciement", a répété mercredi devant les rédactions Claude Perdriel, selon des propos rapportés par des participants à l'AFP. "Il n'y a que deux choses qui le gênent", le mode de nomination du directeur de la rédaction de Challenges ainsi que la mention de "l'adhésion à l'économie sociale de marché" dans la charte du journal, a-t-il ajouté.
La rédaction est vivement opposée à ces changements. "Nous allons défendre cette charte et tout faire pour conserver cette indépendance" éditoriale, a lancé la présidente de la SDJ de Challenges, Delphine Déchaux. La charte définit Challenges comme "un magazine économique et politique non partisan et indépendant". Elle précise le processus de nomination du directeur de la rédaction, qui doit être validé par un vote de la majorité des journalistes. Fin septembre, les rédactions des trois titres devant être cédés avaient demandé le respect de leur "indépendance éditoriale", et la pérennité du classement annuel des 500 fortunes de Challenges, dans lequel M. Arnault et sa famille occupaient la deuxième place cette année. LVMH était entré dès 2020 à hauteur de 40% au capital des Éditions Croque Futur, qui publient les trois titres. Bernard Arnault n'a "jamais (eu) d'influence quelconque" sur Challenges, qu'il "aime", a assuré mercredi M. Perdriel. Une clause de cession, permettant aux journalistes d'un média qui change de propriétaire de le quitter avec des indemnités sera ouverte durant deux mois.
LVMH détient déjà le groupe Les Echos-Le Parisien, qui comprend les quotidiens éponymes et Radio Classique. Il a aussi racheté cette année la totalité du quotidien libéral L'Opinion et du site d'actualité financière L'Agefi, dont il détenait déjà des parts.