AT&T finalise le rachat du groupe Time Warner

Le groupe américain des télécoms AT&T a annoncé jeudi la finalisation officielle du rachat du groupe de médias Time Warner, suite logique du feu vert d'un juge mardi, mais le ministère de la Justice peut encore contester la fusion. Cette union va permettre "de proposer aux clients une expérience de divertissement adaptée, de haute qualité et donnant priorité au mobile", a déclaré le PDG d'AT&T, Randall Stephenson, cité dans un communiqué annonçant le bouclage de l'opération. Un juge fédéral a donné mardi son aval inconditionnel à cette fusion à 85 milliards de dollars, un revers pour le ministère de la Justice américain qui y était opposé. Il avait saisi les tribunaux fin 2017 pour la bloquer, la jugeant mauvaise pour la concurrence. AT&T, qui avait déposé son offre sur Time Warner en 2016, avait annoncé dans la foulée qu'il comptait boucler l'opération au plus tard le 20 juin. Le bouclage de la transaction signifie que le ministère de la Justice a renoncé à demander une suspension de la fusion, ce qu'il était en droit de faire dans les jours suivant la décision du juge. Toutefois, cela n'empêche pas le gouvernement de faire appel de ce jugement, même après la clôture formelle de la fusion. Dans un paysage des médias et d'internet en plein bouleversement, les acteurs traditionnels cherchent à grossir pour lutter contre les géants technologiques comme Netflix ou Amazon, qui sont à la fois producteurs de contenus et plateformes de diffusion.

D'où l'idée d’AT&T de combiner ses canaux de diffusion (haut débit, mobile, télé par satellite...) aux contenus de Time Warner, propriétaire notamment des studios de cinéma et de télévision Warner Bros., de la chaîne d'infos CNN ou de HBO, créatrice de la série "Game of Thrones". AT&T peut donc désormais mettre en œuvre la fusion en interne, qui crée une nouvelle organisation en quatre activités principales : "AT&T Communications" (mobile, haut débit, vidéo ...), un ensemble qui a représenté 150 milliards de dollars de chiffre d'affaires en 2017 ; et "AT&T media business", qui comprendra HBO, Turner (CNN) et Warner Bros. pour un chiffre d'affaires combiné de 31 milliards en 2017. Viennent ensuite "AT&T International" (en Amérique latine principalement, 8 milliards de dollars) puis les "activités d'analyses de données et la publicité". L'ex-PDG de Time Warner Jeff Bewkes officiera comme "conseiller" pendant "une période de transition", a précisé AT&T.

Le rapprochement des deux entités qui ont des cultures d'entreprise bien différentes ne coulera pas forcément de source, selon certains analystes. "Ces genres de fusions sont historiquement difficiles à mettre en œuvre concrètement", relève l'analyste spécialisée Rebecca Lieb, qui cite le précédent, raté, de la gigantesque fusion en 2000 entre Ti me Warner et AOL, le fournisseur d'accès internet. Pour Mme Lieb, "fusionner la distribution et la création est plus facile à dire qu'à faire, en particulier à une échelle" pareille, tandis que l'analyste Roger Kay (Endpoint Technologies) estime qu'AT&T pourrait "avoir du mal à gérer ce conglomérat" gigantesque et très diversifié. Alan Wolk, spécialiste des médias, estime en revanche que "même si toute fusion peut avoir des accrocs, une fusion verticale (entre entreprises qui ne sont pas directement concurrentes) est généralement plus fluide" qu'une fusion entre rivaux directs. Les experts s'attendent à ce que la décision du juge marque le coup d'envoi d'autres gros mariages. Le câblo-opérateur Comcast a lancé dès mercredi une offre sur l'essentiel des actifs de Fox, pourtant promis à Disney depuis six mois.

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