L’audiovisuel public dans une seule holding : France Médias

Franck Riester

Franck Riester, ministre de la Culture

Conscient que la partie de son projet de loi de réforme de l’audiovisuel consacré à l’audiovisuel public susciterait à lui tout seul les plus grandes attentions et exégèses, le ministre de la Culture Franck Riester avait bien pris soin d’en séparer les différents points. Les projets de loi concernant spécifiquement la régulation et le financement de la création ont déjà fait l’objet d’une annonce de leurs contours début septembre. Place cette fois, donc, à l’audiovisuel public… Et c’est dans les colonnes du Figaro que le ministre détaille les ambitions du projet de loi. Et, là, pas vraiment de surprise avec la mise en branle d’une regroupement maousse costaud de France Télévisions, Radio France, l’Institut national de l’audiovisuel (INA) et France Médias Monde (RFI, France 24, Monte Carlo Doualiya). Dans ce qui se présente comme une « BBC à la française », le nouvel attelage via une nouvel holding sera baptisé simplement « France Médias ». « Le projet de loi que je porte prévoit la création d'une société mère à la tête d'un groupe baptisé France Médias. La société mère détiendra 100 % du capital des sociétés filles », a précisé le ministre au Figaro. Une nouvelle organisation qui aura un air de déjà vu pour les plus anciens, ceux qui ont connus l’éclatement de l’ORTF en 1975 avec la séparation des radios et TV publiques. Cependant, Arte France et TV5 Monde, aux statuts particuliers avec des actionnariats liés à des pays étrangers ne feront pas partie du nouvel ensemble. Ils conserveront « leur actionnariat et leurs gouvernances actuelles », souligne Franck Riester.

Une holding pour 2021

France Médias devrait être véritablement créée début 2021, selon le ministre, tandis que les dirigeants des entreprises concernées verront leurs mandats prolongés jusqu'à fin 2022, pour s'aligner sur la mise en place de cette nouvelle organisation. En outre, le projet de loi porté par M. Riester va consacrer le changement du mode de désignation des dirigeants de l'audiovisuel public, actuellement nommés par le CSA. Ils seront désormais choisis par les conseils d'administration des entreprises concernées, dont celui de France Médias. Le ministre a assuré que, pour préserver l'indépendance du service public, l'État sera minoritaire au sein du conseil d'administration de France Médias, et le président ou la présidente qui aura été désigné(e) ainsi devra être validé(e) par le CSA et par les commissions parlementaires de la Culture. Ces commissions pourront exercer un droit de veto, aux « 3/5ème des voix ». « C'est le meilleur système pour garantir la nomination d'un président compétent et indépendant », sans revenir au régime en rigueur sous le quinquennat Sarkozy où c'est le président de la République lui-même qui désignait le patron de France Télévisions, a plaidé M. Riester.

CSA + HADOPI = ARCOM

Enfin, le ministre a annoncé que la future autorité de régulation issue de la fusion entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel et de l'Hadopi, dont il a annoncé la création au début du mois, toujours dans le cadre de cette réforme, s'appellerait "l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique", et aurait pour sigle l'ARCOM.

Les groupes audiovisuels concernés :

- France Télévisions : constitué en 1992, comprend 6 chaînes nationales diffusées sur la TNT (France 2, 3, 4, 5, Ô et franceinfo), et la plateforme en ligne france.tv, plus une vingtaine d'antennes régionales et des chaînes et stations ultramarines. Dirigé depuis avril 2015 par Delphine Ernotte Cundi, il comptait 9.618 équivalents temps plein (ETP) fin 2018. Le groupe dispose du budget le plus élevé de tout l'audiovisuel en France, malgré un plan d'économies et des réductions d'effectifs : 2,8 milliards d'euros en 2018, dont 2,5 milliards issus de la redevance. Il doit préparer l'arrêt l'an prochain de France 4 et France Ô, et met les bouchées doubles pour développer ses offres en ligne. Outre France.tv et des offres destinées aux jeunes et aux enfants (comme Slash et Okoo, attendue fin 2019), le groupe va lancer d'ici fin mars 2020 Salto, plateforme commune avec TF1 et M6.

- Radio France : né en 1975, rassemble sept stations (France Inter, franceinfo, France Culture, France Musique, Fip et Mouv', plus France Bleu et ses 44 stations locales), et quatre formations musicales (deux orchestres, un choeur et une maîtrise). Il est dirigé depuis l'an dernier par Sibyle Veil. Le groupe comptait fin 2018 4.780 salariés, pour un budget d'un peu moins de 700 millions d'euros, dont environ 600 millions issus de la redevance. Il est également lancé dans un plan d'économies, qui prévoit la suppression de 300 postes d'ici 2020. Côté chantiers, Radio France est déjà très actif dans le numérique, mais doit aussi faire face à l'évolution accélérée des usages, avec le développement des enceintes connectées et des plateformes musicales et audio, sans oublier la radio numérique (DAB+).

- France Médias Monde : dernier né des groupes de l'audiovisuel public, créé en 2008 sous l'intitulé d'"Audiovisuel extérieur de la France" (AEF) puis rebaptisé France Médias Monde en 2013. Il rassemble trois grands médias émettant dans une quinzaine de langues et au rayonnement mondial : Radio France Internationale (RFI), la chaîne d'info France 24, et la radio arabophone Monte Carlo Doualiya. Le groupe dirigé par Marie-Christine Saragosse emploie environ 1.800 personnes. Il dispose d'un budget de 280 millions d'euros, dont environ 260 millions issus de la redevance.

- Institut national de l’audiovisuel (INA) : créé en 1975, premier centre d'archives numérisées au monde, ses fonds rassemblant plus de 19 millions d'heures de télévision et de radio. Il archive aussi certains sites web et comptes Twitter. Mémoire de la télévision française, l'INA valorise ces archives via la production d'émissions et l'édition de DVD, CD, et livres. Il propose aussi de nombreuses formations à l'audiovisuel et abrite le Groupe de recherches musicales (GRM). Dirigé depuis 2015 par Laurent Vallet, l'INA comptait fin 2018 943 salariés pour un budget d'environ 120 millions d'euros, issus aux deux-tiers de la redevance.

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