Comment Michel Field veut changer l'info de France Télévisions

"Mon poste, c'est un truc de dénarcissisation totale". Invité jeudi dernier du traditionnel déjeuner de l'Association des journalistes média (AJM), le directeur de l'information de France Télévisions Michel Field aura fait face avec sa maitrise de vieux briscard à qui on ne l'a fait plus sur les sujets "chauds". Mais plus seul, en se mettant en avant comme il le fait depuis le début de sa carrière audiovisuelle (Europe 1, TF1, LCI, etc.), mais en jouant la carte des équipes du groupe public qui travaillent ensemble. Pêle-mêle interrogé sur les médias et l'élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis ou encore sur la qualité générales des programmes TV, il se fend d'un "notre métier n'a pas beaucoup de mémoire autocritique" ou "la TV consomme très vite des idées qui ont des effets pervers". Et pour franceinfo qui affiche, pour l'heure, 0,2% d'audience depuis son lancement en septembre dernier ? Pas d'inquiétude au compteur, rappelant que ce projet est "essentiellement numérique pour capter les nouveaux usages". Le site de franceinfo, souligne-t-il au passage, étant passé de la 6ème à la 4ème place des sites d'info. Ce qui l'intéresse, ce sont ses données d'audience et de fréquentation "4 écrans" (TV, PC, mobile, tablette) qui seront publiées en janvier prochain par Médiamétrie. En attendant, la chaine d'information devrait connaitre une V2 dès le mois de décembre avec "un renforcement éditorial des journaux" ainsi qu'un renforcement de "l'incarnation" de la chaine. La V3 sera pour "février-mars" 2017, complète Michel Field. Côté confrères, il fait part de sa "sympathie" aux collaborateurs de iTélé en grève depuis déjà plusieurs semaines, et dont il reçoit "2 à 5 mails par jour".

Une seule rédaction nationale en 2018

Quant aux chaines du groupe, il concède là aussi que la fusion des rédactions de France 3 "inquiète". Mais que cette mesure "organisationnelle" doit s'accompagner d'un renforcement de son identité régionale. France 2 se devant d'être "plus institutionnelle" quand France 3 doit faire montre, sur tous les sujets, "de son enracinement local". Quoi qu'il en soit, selon le directeur de l'information de France Télévisions, "en 2018, il n'y aura plus qu'une rédaction dédiée aux éditions nationales de France 2, France 3 et franceinfo". Cette dernière n'étant, au passage, "pas une chaine de plus, mais une édition permanente de la rédaction". De même, "après la période électorale", le groupe France Télévisions opérera la fusion des services politique "avec un rapprochement géographique dès cette semaine", annonce-t-il. Et d'autres services comme celui des JRI prévu "à l'horizon 2017". En clair, un peu comme si le projet "Info 2015" lancé par le prédécesseur de Delphine Ernotte Cunci à la présidence de France Télévisions, Rémy Pflimlin, devenait "Info 2018"...

Avec franceinfo pour modèle ?

Dans ce contexte, franceinfo et son organisation peuvent-ils devenir le modèle d'information à venir du groupe audiovisuel public ? "Factuellement, non", assène M. Field. Car pas transposable en l'état avec les conventions collectives actuelles. "Mais aujourd'hui, nous sommes dans une telle révolution technologique avec un seul journaliste qui peut potentiellement faire un reportage avec un iPhone", c'est tout le débat des "compétences complémentaires" qui est ouvert. Chez franceinfo, il y a "une forme de polyvalence", assure-t-il encore, mais il y a "des précautions à prendre" pour ce qui peut constituer un véritable "laboratoire". Selon lui, les représentants syndicaux du groupe "se rendent bien compte que l'avenir, il est là aussi. On ne peut plus continuer à faire comme avant". Néanmoins, le dirigeant se dit "dans une logique de dialogue social à outrance". Il noircit même le tableau : "l'idée d'une sidérurgie de l'audiovisuel public n'est pas impensable : les grands groupes audiovisuel public ont la nécessité de s'adapter à la nouvelle donne technologique".

Temps de parole FN : une lettre au CSA

Enfin, avec l'élection présidentielle française 2017 en ligne de mire, Michel Field a indiqué que France Télévisions allait adresser un courrier au CSA sur ce qu'il considère comme un détournement par le Front national des règles sur l'équité du temps de parole. "C'est un parti qui fait extrêmement bien de la politique : le FN a repéré les failles du dispositif du CSA ; il refuse systématiquement les invitations consommatrices de temps de parole", a-t-il souligné.En cette période de "précampagne électorale", le CSA effectue un relevé mensuel du temps de parole de chaque parti politique, qui doit être réparti de façon équitable entre les différentes formations. Selon Michel Field, le FN accumule son temps de parole pour le concentrer sur janvier, juste avant la remise à zéro des compteurs fin janvier, avant le passage à la période de campagne officielle. France Télévisions va donc envoyer dans les prochains jours une lettre au CSA pour signaler cette "stratégie" du FN, a-t-il annoncé. Le CSA avait déjà affirmé en début de semaine que "les refus seraient aussi pris en compte dans les délibérations de temps de parole". "Il appartient aux chaînes de nous les faire connaître, ça peut jouer sur l'appréciation du rééquilibrage" entre les partis, avait indiqué une porte-parole, contactée par l'AFP.

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