Groupe Le Monde : Matthieu Pigasse se veut rassurant

Matthieu Pigasse

Matthieu Pigasse, co-actionnaire majoritaire du Monde, tente de calmer le jeu face aux craintes des salariés du quotidien pour l'indépendance de leur groupe, mais refuse cependant que ceux-ci fixent toutes les conditions d'une éventuelle cession. L'investisseur, qui a cédé 49% de ses parts au milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, a souligné dans une lettre au pôle d'indépendance du Monde qu'il avait toujours été favorable sous conditions à un "droit d'agrément" en cas d'entrée d'un nouvel actionnaire majoritaire. Mais il a prévenu qu'il refuserait un "droit de répudiation" qui permettrait aux salariés de le choisir directement. Les journalistes du groupe Le Monde (le quotidien, Télérama, Courrier International) avaient fait part de leur inquiétude dans une tribune face à une éventuelle prise de contrôle du Monde par Daniel Kretinsky, soutenus vendredi par quelque 500 personnalités.   Les discussions pourraient reprendre en début de semaine. "C'est moi qui ai proposé ce droit d'agrément, j'y suis évidemment favorable. On en discute encore les modalités", a déclaré Matthieu Pigasse dans un entretien à l'AFP. Face aux inquiétudes sur l'indépendance du journal, l'investisseur a assuré "solennellement" qu'il resterait l'actionnaire majoritaire de sa part du Monde qu'il co-détient avec l'investisseur tchèque Daniel Kretinsky, via la société LNM. Un nouvel actionnaire majoritaire devrait remplir "des critères d'honorabilité, de moyens financiers et bien évidemment l'engagement de respecter les règles d'indépendance du Groupe, permettant d'exclure sur une base objective des actionnaires manifestement contraires ou incompatibles avec les valeurs qui sont les nôtres", précise l'investisseur dans sa lettre. Les salariés seraient informés "plusieurs mois à l'avance".

L'autre actionnaire majoritaire, Xavier Niel, a également validé ce droit d'agrément. Reste le problème du prix, un désaccord qui "n'a pas changé en six mois", soupire une source proche du dossier. Dans sa lettre au pôle d'indépendance (qui regroupe salariés, journalistes et lecteurs), Matthieu Pigasse refuse cependant que soient ajoutées à ce cadre "des clauses telles, que le droit d'agrément devienne en réalité un droit de répudiation, et même en pratique une clause d'inaliénabilité". En cas de désaccord sur le nouvel actionnaire majoritaire, le pôle d'indépendance "entend fixer lui-même le prix de revente et passer par un expert indépendant. Ce n'est pas possible", a souligné Matthieu Pigasse. Lui souhaite que tout nouveau repreneur ait "l'obligation de racheter la participation dans les mêmes conditions financières". Pigasse et Kretinsky devraient boucler d'ici la fin de l'année le rachat des parts du groupe espagnol Prisa, montant à 46% du capital de LML, la société qui contrôle 75% du capital du quotidien. Si ce mouvement est surtout symbolique, car il ne changerait pas leur pouvoir économique du fait du statut de LML, il romprait l'équilibre qui prévalait depuis la recapitalisation en 2010 par le trio Xavier Niel-Pierre Bergé-Matthieu Pigasse.

Pas "l'intention" de céder le co-contrôle du Monde

Matthieu Pigasse explique avoir dû céder 49% de ses parts à Daniel Kretinsky "compte tenu de charges financières nouvelles et de pressions de natures diverses". "Son attachement au pluralisme et à l'indépendance éditoriale, sa dimension européenne, son talent d'entrepreneur, en font pour moi un partenaire idéal", a-t-il assuré. "Je n'ai ni l'intention et ni l'objectif de céder le contrôle de LNM et le co-contrôle du Monde", a martelé Matthieu Pigasse samedi. "Le nouvel actionnaire est minoritaire et passif. Il a les droits d'un minoritaire, ni plus ni moins". Dans cette affaire, "il y a eu un peu de malveillance, avec parfois un délit de sale gueule, et une forme d'instrumentalisation du débat", a dénoncé l'investisseur.

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