Réforme audiovisuelle : le coup d'accélérateur

Franck Riester

Franck Riester, ministre de la Culture

La réforme audiovisuelle se concrétise : elle va acter le regroupement du service public dans une holding (hors Arte et TV5) et une fusion entre le CSA et l'Hadopi, ont indiqué lundi à l'AFP des responsables du secteur. Le ministre de la Culture Franck Riester vient de lancer de nouvelles consultations au sein du secteur audiovisuel, en vue de boucler un projet de loi qu'il doit présenter cet automne et qui est censé être voté en janvier 2020, après un passage devant diverses instances en septembre et une présentation en conseil des ministres prévue début novembre. Cette réforme, fruit d'une promesse de campagne d'Emmanuel Macron, et lancée par le prédécesseur de Franck Riester, Françoise Nyssen, qu'il a remplacée il y a un an, a été repoussée à plusieurs reprises. Elle vise notamment à adapter la réglementation et la régulation du secteur aux enjeux du numérique, qui ont bouleversé profondément les usages des Français en matière de consommation de la télévision et introduit une nouvelle concurrence féroce pour les chaînes du PAF.

L’assouplissement des contraintes

Dans ce contexte, les chaînes françaises réclament avec insistance un assouplissement des contraintes réglementaires qu'elles doivent respecter depuis plusieurs décennies, alors que les plateformes comme Netflix font comme bon leur semble. En février l'Autorité de la concurrence leur avait apporté son soutien en appelant le gouvernement à desserrer ce carcan réglementaire pour "rétablir une forme d'équité des règles du jeu". Un message bien reçu rue de Valois. Selon plusieurs sources qui souhaitent rester anonymes, confirmant une information des Echos, M. Riester a indiqué lors de cette concertation qu'il reprendrait en partie les demandes des chaînes dans le projet de loi, mais avec des garde-fous, pour ne pas léser les secteurs d'activité protégés par les règles actuelles (exploitants de salles, médias locaux...). Le projet de loi autorisera donc la publicité dite "segmentée" sur les chaînes distribuées via les box, comme la diffusion de pubs géolocalisées, mais de manière encadrée : les distributeurs pourront diffuser des publicités ciblées et géolocalisées, mais sans pouvoir mentionner les adresses de leurs points de vente.

Autre mesure réclamée par le PAF, les télés pourront désormais diffuser des films quand elles le veulent : le projet de loi mettra fin à l'interdiction des films certains jours ou soirs, une disposition qui visait à protéger les salles de cinéma, mais qui ne s'appliquait pas aux plateformes de streaming...   Par ailleurs, le projet de loi tranche en faveur d'une fusion entre le CSA et l'Hadopi, évoquée depuis plusieurs mois, mais pas avec l'Arcep. Une décision qui va dans le sens du CSA, favorable à un rapprochement avec l'Hadopi, mais qui n'était pas enchanté par un mariage avec l'Arcep ou la CNIL, prôné par certains. En revanche, une "collaboration renforcée" avec l'Arcep est bien prévue. Le CSA verra également ses pouvoirs d'arbitre renforcés, pour empêcher que des téléspectateurs soient privés de certaines chaînes à cause de bras de fer avec des opérateurs de télécoms, comme dans le litige actuel entre Free et BFMTV.

Une « BBC à la française »….

Quant à la création d'une holding supervisant les différentes entreprises de l'audiovisuel public, envisagée depuis le début du quinquennat, une "BBC à la française", elle est désormais actée, a précisé l'une des sources. Mais cette nouvelle structure n'inclura ni la chaîne franco-allemande Arte ni la chaîne francophone TV5 Monde, aux statuts particuliers car elles sont issues de coopérations internationales.  Cette holding devrait donc regrouper finalement France Télévisions, Radio France, France Médias Monde (maison mère de RFI et France 24) et l'Institut national de l'audiovisuel. De quoi rassurer Arte, qui avait publiquement demandé que son indépendance soit préservée.

Enfin, le projet de loi consacrera le changement du mode de désignation des dirigeants de l'audiovisuel public, actuellement nommés par le CSA, et qui seront désormais choisis par les conseils d'administration des entreprises concernées. Des nominations qui, sans revenir au président de la République, comme durant l'ère Sarkozy, seront donc soumises à l'influence du gouvernement, via ses représentants dans ces conseils d'administration, mais qui devront être validées par le CSA et des commissions parlementaires. Mais tout cela, le ministre de la Culture va pouvoir le détailler dès ce mardi puisqu’il sera l’invité du traditionnel déjeuner de l’Association des journalistes médias (AJM).

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