Gaming : ce qu’il faut retenir (et ne pas retenir) des Cannes Lions

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Parmi les campagnes sélectionnées aux Cannes Lions en juin dernier, plusieurs dizaines avaient trait au Gaming. En s’y intéressant de près, on a pu tirer plusieurs enseignements : certains tireront définitivement vers le haut les annonceurs qui voudront s'aventurer dans le monde du marketing vidéoludique dans les prochains mois, et d’autres… beaucoup moins.

Saisir les opportunités liées aux comportements des joueurs et aux spécificités des plateformes

Il serait dommage de se servir d'un nouvel environnement pour y appliquer des vieilles recettes publicitaires, alors que le jeu vidéo permet de résoudre des problèmes avec des solutions qui n'existent pas dans le monde physique.

En transformant une bibliothèque virtuelle construite dans Minecraft en un média libre de toute censure, Reporters Without Borders a pu faire de leur "Uncensored Library" une campagne véritablement iconique, qui a permis non seulement aux habitant des pays où l’information est contrôlée et manipulée par les gouvernements de découvrir des documents censurés mais aussi au reste de l’opinion publique de prendre conscience du problème.

Pourquoi s'imposer aux joueurs quand on peut jouer avec eux ? En adoptant une posture de générosité, une marque peut récompenser les joueurs pour leur attention, et ce, de différentes manières.

Plus une stratégie qu’une idée créative, Wendy’s est devenu streamer sur Twitch dans le but de divertir les communautés de joueurs. On a pu alors retrouver la marque sur un grand nombre de jeux de Fortnite, à Roblox en passant par Smash Bros, soit sous forme d’avatar directement tiré de son logo, soit via la création de niveaux, sur Super Mario Maker par exemple, mis à la disposition des joueurs. En créant des contenus divertissants et qui ont de la valeur aux yeux des joueurs, Wendy’s est entré dans le top 1% des streamers les plus regardés sur Twitch.

En observant les habitudes des joueurs et leurs besoins sur les plateformes de jeu, on peut facilement trouver une utilité en tant que marque. Ces derniers sauront d'ailleurs reconnaître et apprécier celles qui font l’effort de les comprendre.

Les joueurs peuvent dépenser beaucoup d’argent pour obtenir des tenues virtuelles pour leurs personnages préférés (les fameuses “Skins”). En proposant d’échanger des vêtements inutilisés contre des skins gratuites Flow, une plateforme de VOD argentine et la Fondation Manos Abiertas ont su engager les joueurs en transformant une habitude en récompenses en échange d’un acte de générosité à destination d’enfants défavorisés.

Quand la recherche de visibilité prend le pas sur la création de valeur

Attention à ne pas abuser des coups publicitaires. Si les campagnes Burger King "hackant" les fonctionnalités de Twitch ont eu un bel écho dans la communauté publicitaire, les dents ont grincé dans la communauté Gaming, accusant la marque d'intrusivité.

Les streamers n’ont en effet pas apprécié que la marque de fast food utilise leur espace sans permission pour faire la promotion de leurs menus, et surtout en utilisant le système de dons habituellement réservé aux spectateurs qui souhaitent verser quelques dollars à leur influenceur préféré. La plupart des streamers qui ont participé malgré eux à l’opération ont regretté que Burger King ne les ai pas contactés pour co-créer une activation ensemble dans laquelle la marque, le streamer et les spectateurs auraient tous été gagnants.

Avec “Anti-Bullying Skin”, Samsung propose à des streamers d’offrir des skins Fortnite spéciales aux joueurs qui n’ont pas les moyens de jouer avec autre chose que celle que le jeu attribue par défaut et qui est source de harcèlement. De toute évidence, le harcèlement est un problème sérieux aux conséquences parfois graves, et offrir des skins gratuites est loin d’être une solution satisfaisante tellement elle semble dérisoire.

Restons humbles : on ne règlera pas des problèmes profonds avec une campagne, si intelligente soit-elle. En revanche si vous cherchez à adresser un problème sociétal grâce au jeu vidéo (qui sont par ailleurs un excellent moyen d'opérer le fameux saut créatif) alors un conseil : étudiez-en bien usages et essayez d’apporter une solution mesurée tant en termes de posture que de ton, même si elle n’est que partielle.

Finalement, si les opérations dans le Gaming se démocratisent, on peut voir des tendances se profiler :

- La création d’expériences immersives qui vont prendre le contrepied des conventions du monde physique.

- Le fait d’apprendre des comportements des joueurs pour construire une passerelle entre le virtuel et le réel,

- et enfin l’adoption d’un positionnement généreux et fun lorsqu’il s’agit d’engager des joueurs pas forcément habitués à voir les marques investir les espaces auxquels ils tiennent.

Cependant, certaines activations tombent dans des travers propres à la publicité en générale comme le fait de prioriser la visibilité à la création d’une expérience à valeur ajoutée, ou le fait d’essayer d’adresser maladroitement un problème qui dépasse largement le cadre de la campagne. On garde évidemment en tête que ces enseignements peuvent s’appliquer à toutes les campagnes, Gaming ou pas.

(Les tribunes publiées sont sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas CB News).

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