Identité graphique des marques : l’uniformisation n’est pas une fatalité

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(©  VanidaHoang_Matmut)

L’exposition « Années 80 » qui se tient actuellement au Musée des arts décoratifs, à Paris, célèbre la frénésie éclectique et colorée de cette époque, notamment dans les domaines du design et du graphisme. Plusieurs décennies plus tard, sur fond de globalisation culturelle, d’homogénéisation et de simplification des designs, la radio France Culture diffusait tout récemment une émission au titre évocateur : « Pourquoi la couleur a-t-elle disparu de notre quotidien ? ».

Par ailleurs, la prise en compte des enjeux environnementaux et sociétaux pousse les organisations à toujours plus de sobriété dans leur communication, avec le sujet de la communication responsable de plus en plus prégnant. Et ce alors même que nous vivons à une époque d’infobésité et que, par exemple, les Français sont en moyenne exposés à plus de 15 000 stimuli commerciaux par jour, comme le souligne Arnaud Pêtre, chercheur en neuromarketing.

Une fois ce décor planté, on devine bien les injonctions paradoxales auxquelles sont confrontées les marques. La volonté de se singulariser VS la tendance à l’uniformisation. Le souci de la sobriété VS le désir d’émergence. Alors comment, à la lumière des travaux récemment menés par le Groupe Matmut pour refondre son identité graphique, dessiner ce que peut être un chemin conciliant toutes ces injonctions ?

Dans identité visuelle, il y a ‘’identité’’

La Matmut a désormais un nouveau logo. Le précédent a été utilisé durant 20 ans. Mais au fait, un logo, à quoi est-ce que cela sert ? La racine de logotype est logos, qui en grec signifie la parole. Ainsi, c’est bien autour du logo que s’organise le discours d’une entreprise. Et que donc s’exprime son identité, c’est-à-dire ce qui la rend unique et identifiable aux yeux de tous.

L’identité visuelle n’est ni un élément isolé de l’institution qu’elle ‘’illustre’’, ni une finalité.

La question de l’usage est essentielle. Je vais être directe, je ne crois pas à ‘’un monde en noir et blanc’’ – j’y reviendrai. Cependant, s’affranchir du questionnement sur l’usage qui va être fait de l’identité visuelle n’est pas une option car elle doit répondre aux enjeux RSE. Typographie, combinaison des couleurs et des nuances, espacement des caractères, vitesse des animations sur le web… L’accessibilité et l’inclusion ont particulièrement été pris en compte dans nos travaux récents, en lien avec l’agence FutureBrand. J’évoquais précédemment l’identité d’une organisation. Vous ne serez pas surpris de lire que l’inclusion/l’accessibilité constitue précisément un des piliers de la politique RSE du Groupe Matmut.

Ainsi, si comme l’a écrit Assaël Adary, le Président du cabinet Occurence, ‘’le rôle de la communication est d’assurer la fonction pédagogique de son organisation’’, indéniablement, l’identité visuelle en est un maillon intrinsèque essentiel.

Simplification ne veut pas dire effacement

Antoine de Saint-Exupéry a écrit que ‘’ la perfection est atteinte, non pas quand il n’y a plus rien à ajouter mais quand il n’y a plus rien à retirer ‘’. Dans ce cas, nous vivons alors une période parfaite en termes de design de logos. Le développeur Radek Sienkiewicz l’a bien démontré dans ses travaux récents : les logos des marques s’uniformisent, se simplifient, se ressemblent tous… La tendance est nette, elle renvoie notamment aux impératifs de sobriété évoqués précédemment, mais aussi et surtout à la globalisation culturelle, avec des codes qui ne sont plus ‘’régionaux’’ mais bien mondialisés.

Ainsi, au prétexte d’une prétendue modernité, hors homogénéisation, point de salut ?

Personnellement, je ne le pense pas. Je ne crois pas à un monde en noir et blanc. Rendre accessible ne signifie pas automatiquement voir son logo être noyé dans une ‘’mer de similitudes’’ (R.Sienkiewicz), sans aucune possibilité d’émergence. La couleur a encore sa place, pour peu qu’elle exprime quelque chose, qu’elle provoque une émotion. Par exemple, un bleu rassurant, pour faire écho à la fiabilité recherchée chez un assureur. Ou encore une palette de couleurs vives, pour représenter la diversité des offres d’une mutuelle d’assurance ‘’tout public’’.

En synthèse, pour qui se lance dans des travaux de refonte de l’identité visuelle de son organisation, il apparaît naturellement indispensable de prendre en compte les tendances de l’époque, d’intégrer les nouveaux usages, notamment digitaux... Mais il est tout aussi indispensable de relever le défi de la singularité et de la différenciation. Et pour ce faire, un seul prérequis : s’appuyer sur l’ADN et l’identité de la structure.

(Les tribunes publiées sont sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas CB News).

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