LES RÉSEAUX SOCIAUX : FLÉAUX OU AUBAINES POUR LES MARQUES FACE AUX CRISES ?

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Les réseaux sociaux sont aujourd’hui au cœur des gestions de crises pour les marques, étant désormais aussi leur lieu de naissance. Une des caractéristiques les plus importantes des réseaux sociaux réside dans leur capacité à diffuser de manière très large et instantanément une information voire une fausse information. 54 % des professionnels du marketing et des relations publiques révèlent qu’en matière de gestion de crise, leur plus grande difficulté demeure dans le fait de réagir le plus vite possible. Aujourd’hui quel que soit leur secteur d’activité, les marques sont donc de plus en plus impactées par les phénomènes de bad buzz ou crise de réputation présents sur le web et les réseaux sociaux, et dont les conséquences peuvent entacher leur réputation, allant du mouvement de boycott jusqu’à impacter leur santé financière. Mais les marques doivent garder un œil attentif sur ces nouveaux canaux d’interaction qui peuvent représenter aussi une opportunité pour une communication de crise mieux maîtrisée.

Moins de crises mais plus graves

Depuis l’explosion des réseaux sociaux, les marques sont fortement exposées aux crises de réputation ; allant du simple "bad buzz" aux crises de très grandes ampleurs. Avec l'ascension des réseaux sociaux, les crises peuvent désormais venir de partout et à tout moment. L’on pourrait croire que les réseaux sociaux favorisent l'augmentation des “bad buzz”, mais le nombre de crises a bien diminué ces dernières années, atteignant seulement la moitié du niveau observé entre 2013 et 2019 [1]. Le nombre de crises diminue mais c’est en réalité leur gravité qui augmente, nous l'avons vu encore très récemment avec le dérapage de Cyril Hanouna et sa gravité qui met en cause non seulement le groupe Bolloré mais aussi et surtout l’indépendance des médias en tant que tel ! De plus, un phénomène se concrétise de plus en plus : la crise de mon concurrent est ma crise. Comme lors du scandale Buitoni qui a eu des répercussions sur l'ensemble des pizzas surgelées ou fraîches vendues en supermarché. Entre mars et juin 2022, leurs chiffres de vente ont respectivement baissé de 34% et de 9%, en raison de la gravité de la crise ayant particulièrement choqué les consommateurs. Ce phénomène montre l'importance non plus seulement de monitorer ses propres crises, mais aussi celles de ses concurrents puisqu’elles peuvent aussi avoir un impact majeur sur notre business. Dans un contexte mondial particulièrement inédit et instable, la guerre en Ukraine, l’inflation et l’approche d’une récession font également peser de nouvelles menaces exogènes sur les marques. Elles ne sont plus seulement les actrices des crises mais aussi de plus en plus exposées à un contexte mondial inédit.

Des crises de plus en plus intenses. Aujourd'hui les marques qui rencontrent des crises font désormais face à des pics d’intensité qui s’amplifient, et des volumes de commentaires négatifs qui font de même. Entre le 18 mars et 4 avril dernier, deux géants de l’industrie alimentaire, Nestlé et Ferrero, ont dû faire face à la mise en cause d’une partie de leurs produits après de graves intoxications alimentaires. En fait en réalité ce n'est pas tant l'exposition qui est plus forte mais surtout l'impact des crises pour les marques qui est plus grave. Comme dans le cas de Doctolib, en août dernier la plateforme s’est vu reprocher l’hébergement de thérapeutes douteux et aux pratiques non reconnues qui l'ont amené à changer son modèle. Afin de protéger son image de marque, Doctolib a alors décidé de sévir et a annoncé le 26 octobre dernier, l’exclusion de 5700 praticiens exerçant uniquement des professions de bien-être, non réglementées de sa plateforme.

Même lorsqu'elles s'atténuent, les situations de crises mises bout à bout génèrent un état de tension quasi généralisé, qui semble avoir déplacé le curseur entre communication de crise et communication, rendant presque obsolète la distinction entre les deux. Aujourd’hui, il existe également de nouveaux phénomènes comme l’effet longue traîne des crises lorsque celles-ci resurgissent dans l’actualité quelques semaines/mois/années plus tard, intensifiant l’effet pervers des crises sur le long terme et les obligeant à les monitorer sur le temps long.

Notamment avec les Réseaux sociaux

Médias comme réseaux sociaux, ces plateformes peuvent à la fois ternir et détruire l’image d’une marque, en déclenchant des crises et en les alimentant. Mais ces nouveaux outils ont aussi le pouvoir de redorer l’image d’une marque et sont un moyen de défense en temps de crise.

Aujourd’hui, on observe aussi une mondialisation de la crise car elles sont quasiment toutes devenues digitales. Twitter est le lieu incontournable de 59% des crises [2], mais de plus en plus d’autres réseaux sociaux sont en vogue, notamment TikTok et Instagram. En 2022, 17 % des crises numériques ont été commentées sur Instagram soit 11 % [3] de plus que l’année passée ! Le réseau social TikTok a quant à lui recensé 6 % des crises commentées. Comme en août 2022, ou le réseau social est inondé de vidéo faisant la promotion de la Biafine comme crème quotidienne. Mais le problème est que la Biafine n'est pas un produit à utiliser en soin de jour et s'avère dangereux pour la santé. Le phénomène dénombre pas moins de 15 millions [4] de vues à partir du hashtag Biafine sur le réseau social chinois, d'où l'importance et le challenge pour les marques de monitorer de plus en plus de sources.

Longtemps définie comme un événement inattendu et soudain, les crises sont aujourd’hui omniprésentes dans la société. Avec des conséquences plus graves, elles se transforment aussi souvent en affaires judiciaires impactant l’évolution des modèles établis. Comme lors de la publication du livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet dénonçant le système du groupe Orpea qui a provoqué un séisme dans le secteur des Ehpad même si une seule entreprise était visée.

Aujourd’hui, les facteurs d’amplification des crises sont de plus en plus nombreux (rôle d’Internet, de la réglementation, les mœurs, etc.) et les individus y sont de plus en plus sensibles, les crises étant digitales et à la portée de tous. Cependant ces nouveaux facteurs comme les réseaux sociaux peuvent également devenir un lieu de résolution des crises. Comme en août 2022 avec le hashtag #SolidarityWithSanna, ou des femmes avaient posté des vidéos d’elles en train de danser à l’instar d’Alexandria Ocasio-Cortez ou d’Hillary Clinton, pour soutenir Sanna Marin, la Première ministre finlandaise. En effet, celle-ci avait été la cible de nombreuses critiques pour avoir dansé avec des amis… Ainsi, on constate que les réseaux sociaux peuvent être également le meilleur allié pour défendre des causes lors de crises injustifiées. D'où l'importance de miser sur la veille, la meilleure arme en matière d’anticipation et de gestion de crise et permettant de surveiller l’impact des crises au fil du temps.

[1] + [2] + [3] - Source : Étude Bad Buzz 2021 par Saper Vedere

[4] https://www.tiktok.com/tag/biafne?is_from_webapp=1&sender_device=pc

(Les tribunes publiées sont sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas CB News).

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