Valorisation et monétisation des données : un souci de qualité et de fiabilité des entreprises

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Aux yeux des organisations, si le partage des données est devenu un impératif business, généraliser son application est loin d’être une mince affaire. Car, malgré le fait qu’on en inculque la valeur aux enfants dès leur plus jeune âge, il faut se rendre à l’évidence que partager un jouet n’équivaut pas à partager ses données avec toute une organisation.

Ceci constitue un casse-tête supplémentaire pour les organisations et les professionnels des données, qui doivent déjà jongler entre la valeur et le retour sur investissement du projet d’un côté, et les capacités d’une équipe et d’une organisation à assurer une gouvernance adéquate et nécessaire de l'autre. Les projets de data sharing ont du mal à voir le jour même si la récente pandémie a souligné comment le partage de données à grande échelle pouvait rendre service à l’innovation.

L’intelligence partagée au service de tous

La technologie et les données ainsi que le Web 2.0 et le Web social, dont les internautes sont devenus de véritables parties prenantes, se retrouvent au centre des nouvelles préoccupations politiques.

À titre d’exemple, l’UE entend placer le numérique au cœur de son développement économique et d’en faire un vecteur d’innovations ; pour atteindre cet objectif, elle met en place de nouvelles initiatives et propositions. Ainsi, le règlement général sur la protection des données (RGPD) a marqué un véritable tournant dans l’industrie du numérique, qui se veut désormais plus transparente et responsable et le Data Governance Act a permis de fournir un meilleur encadrement et une meilleure organisation du partage des données, en faveur de l’innovation et de l’intelligence collective au service de la société entière.

L’intérêt commun devient donc un nouvel enjeu des initiatives open data gouvernementales et les applications Covid mises en place dans les différents pays constituent un excellent cas d’usage : des données sur l’évolution de la pandémie sont mises à disposition des citoyens qui sont eux-mêmes incités à se déclarer en cas de test positif pour alerter les personnes qui auraient été en contact. Cet accès libre et gratuit aux données favorise l’innovation. Les secteurs du transport ou de l’urbanisme ne sont pas en reste car il existe des applications routières comme Waze, qui se servent des données publiées sur les travaux de voiries ou d’éventuels accidents de la route pour fournir à leurs utilisateurs un état des lieux en temps réel des conditions routières.

Un accès à la donnée par le plus grand nombre

L’opérationnalisation de l’open data est cependant compromise par des problèmes qui sont communs à chaque projet data, malgré des premières démonstrations fructueuses et la conscience de sa valeur stratégique. La technologie et sa mise en œuvre, la confiance et la gouvernance des données, et la culture de l’organisation sont des barrières que les organisations ont du mal à surmonter.

Une stratégie de partage de données ne peut se passer des API et c’est paradoxalement ce qui empêche la mise en place de stratégies. Les secteurs publics et privés n’emploient pas le même type d’API. Les organisations du secteur public utilisent et publient majoritairement des API ouvertes et disponibles sans restriction dans le cadre de projets d’Open Data tandis que les organisations du secteur privé font en partie appel à des API privées qui sont internes à l’organisation. Celles-ci sont également appelées « partenaires », et ont les règles d’accès bien spécifiques. Développer des API est un processus long, qui dure trois à cinq jours et qui nécessite des ressources telles que l’emploi de développeurs. Cela dit, de nouvelles technologies et pratiques simplifient ce processus. Il existe par exemple des outils qui mettent à disposition des librairies d’API standards, comme celles permettant par exemple de partager des données entre SAP et Salesforce. Ce genre d’outils facilite énormément la tâche aux data analysts, grands consommateurs d’API, en plus de gérer automatiquement l’accès aux données, et en seulement une heure, ils peuvent publier une API et avoir accès aux informations dont ils ont besoin.  On assiste donc à une augmentation de l’efficacité des processus ainsi qu’à une garantie de la maîtrise des accès grâce à ce type de consommation en self-service.

En plus de garantir cet accès, il faut que les organisations se soucient de la qualité des données. Celles-ci doivent être fiables et gouvernées si elles sont destinées à être partagées et monétisées. Pourtant, ceci représente un défi pour beaucoup des responsables métiers. En effet, s’ils ne s’assurent pas de leur santé, de leur création jusqu'à leur utilisation, et ne contrôlent pas régulièrement leur qualité, comment espérer un cycle de vie durable de ces données ? Elles nécessitent un encadrement strict, sous la forme d’accès réglementé et d’intégration à un cycle de gouvernance, qui est rendu possible grâce à l’utilisation de technologies de qualité des données et de data cataloging, un outil qui garantit la sécurité des données partagées. Certains secteurs ont été précurseurs en la matière, et n’ont pas attendu la mise en place de réglementations européennes pour optimiser la qualité de leurs données. Les secteurs du commerce et de la distribution ont par exemple mis en place des systèmes centralisés de partage des données comme les « data clean rooms », qui possèdent des règles de gestion des accès et de gouvernance.  Celles-ci s’apparentent à des data lake, sur cloud ou sur site, dans lesquelles les données sont cryptées et anonymisées, et rendues accessibles depuis un espace clos et dédié. Des modèles de partage de données performants comme Lydia ont également été développés par les sociétés de la Fintech qui, en s’associant à Bitpanda, permet à ses utilisateurs d’investir dans de la cryptomonnaie en quelques clics.

Malgré toutes les ambitions et les outils à disposition, le plus gros obstacle qui se dresse sur la route vers l’open data est la culture data qui reste omniprésente car il est difficile pour les organisations de se détacher de la notion d’« ownership » des données. Aussi, les projets de partage des données ne concernent pas toutes les branches de métiers. Actuellement, les métiers dans le marketing, le commerce ou la finance sont les plus concernés et c’est à eux que revient la tâche d’éduquer l’IT sur les bénéfices du partage des données et la nécessité de fournir un cadre sécuritaire et des leviers technologiques. Encore faut-il pouvoir se comprendre et déverrouiller les silos. Si c’est au Chief Data Officer d’impulser ce nouveau changement data alors deviendra-t-il un Chief Data Sharing Officer ? Ou bien est-ce cela doit-il directement venir du comité de direction ?

Un autre avantage non négligeable du partage des données est que celui-ci va permettre de favoriser le développement de la « data literacy » au sein d’une organisation., Les technologies sont souvent plus simples à utiliser et les personnes peu familières avec la data trouveront les cas d’usage métiers beaucoup plus concrets. Ceci constitue donc un excellent moyen d’impliquer les collaborateurs, de les fédérer et de les former un peu plus aux données.

Pour que le partage des données soit couronné de succès, il faut que celui-ci repose sur une transparence des données partagées envers les clients et consommateurs. Sans quoi, les projets ne pourront pas voir le jour.

(Les tribunes publiées sont sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas CB News).

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