The end of The End of Advertising ?

Une critique signée Tiphaine de Pélichy, Alexis Abeille, Morgane Bamba, Claire Delsaux, Arthur Jacq, Yann Moster, François Thumerel,Nathalie Tran et Lucie Winckler : 9 jeunes talents de Publicis Media.

Régulièrement un livre sort sur la publicité et certains ont marqué : Disruption de Jean-Marie Dru (1997), ou encore le mythique « Que sais-je » de Maurice Lévy, les 100 mots de la communication (2008). Parfois paraissent également des ouvrages super critiques, mais stimulants, comme récemment celui des prix Nobel d’économie George Akerlof et Robert Shiller : Phishing for Phools: The Economics of Manipulation and Deception (2015). Dans ces conditions, inutile de dire qu’en lisant le titre d’Andrew Essex – The end of adversting – on a été alerté, jeunes qui venons à peine de débuter dans le métier. Un projet étonnant : un livre sur la publicité, écrit par un publicitaire, mais contre la publicité ?

Résumons son propos. Dans le premier chapitre (Adpocalypse), l’auteur explique en quoi l’adblocking est la partie émergée d’un iceberg énorme : les individus peuvent pour la première fois de l’histoire se refuser à la publicité. Pour appuyer cette thèse, quelques anecdotes sur son fiston ou autre, mais aucune data. Dans la seconde partie (Advertising’s Origins), il revient sur les différents ressorts qui ont permis à la publicité d’occuper une place culturelle aussi forte après la deuxième guerre mondiale ; une partie très brève, qui montre que quand la pub a été à son meilleur, elle a été aimée, et qu’elle a été un vecteur énorme de transformation culturelle. Dans la dernière partie enfin, (Future of Advertising), Andrew Essex s’essaie à imaginer les conditions pour renouer avec le succès. Andrew Essex a été publicitaire entre 2005 et 2015, aux côtés de David Droga (ex Worldwide Chief Creative Officer de Publicis Worldwide, puis fondateur de la remarquable agence Droga5).

Il a écrit ce livre en quittant la profession, c’est un livre de bilan. En tant que jeunes publicitaires, pourtant, à la lecture de ce livre, on a presque envie d’en retourner toutes les prémisses. Stéréotypes, paraphrases, superlatifs, manichéisme… Toutes les « révélations » y sont indiquées à coups d’italique pour l’effet dramatique, au risque d’enfoncer des portes ouvertes : « Les gens aiment les marques mais personne n’aime la publicité » , « la publicité est ennuyante » (comptabilisée 6 fois sur une seule page). Au dernier chapitre, on s’accroche à l’espoir d’avoir au moins des projections inédites sur la publicité à venir. Mais là encore, rien de nouveau sous le soleil : la publicité ne « survivra » que si elle est créative. Et utile. Et authentique. Bien que cela soit tout à fait exact, qui ignore cela ?

Au total, Andrew Essex montre qu’on peut être un bon publicitaire et un essayiste qui peut encore, disons, progresser. L’absence totale de données, de preuves, dans un monde où la data et l’evidence-based doivent être des réflexes pour tous les jeunes publicitaires, est un manque. En dépit d’un titre très tonitruant, le livre ne tient pas ses promesses. Cette déception est sans doute l’occasion pour tous les jeunes de se tourner vers des classiques indémodables de notre métier, comme par exemple, « 5 Giants of Advertising », de Philippe Lorin (2001), portraits croisés de Marcel BleusteinBlanchet, Leo Burnett, Albert Davis Lasker, Bill Bernbach et David Ogilvy. Ou encore, notre préféré, « 100 Leo's », qui rassemble 100 pensées clés de Léo Burnett. Allez on vous en cite une pour ce dimanche, en forme de maxime d’humilité pour Andrew Essex et pour nous tous : « I have learned that it is far easier to write a speech about good advertising than it is to write a good ad. »

Andrew Essex, the End of Advertising, 22,90 euros. 

Les 100 mots de la communication, Maurice Lévy, 9 euros.  

JM Dru, Disruption, 25 euros.

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