Fleur Pellerin veut un fonds d’aide à la création des médias, moins d’aides à la presse

La ministre de la Culture et de la Communication Fleur Pellerin veut supprimer les aides postales à la "presse de loisirs et de divertissement" au profit de l'innovation, avec le lancement notamment d'un "fonds d'aide à la création de médias", a-t-elle annoncé mardi. "L'argent public n'a pas vocation à aider la presse de loisirs et de divertissement", comme la presse télé et people ou les féminins, a-t-elle déclaré. "Il m'a semblé juste et pertinent que les sommes allouées à ces aides postales pour la presse de loisirs soient réorientées vers l'aide à l'émergence et l'innovation", a-t-elle précisé lors de la remise d'un rapport sur la presse et le numérique par le sociologue des médias Jean-Marie Charon. A l'inverse, la presse dite de la "connaissance et du savoir" (presse éducative enfant, presse technique, professionnelle, scientifique,...) conservera le bénéfice de l'aide postale. Cette "réorientation" des aides doit permettre "l'ouverture de l'accès au fonds stratégique (pour le développement de la presse) à des acteurs plus nombreux" ainsi que la mise en place d'un "fonds d'aide à la création de médias", a expliqué Fleur Pellerin. Ce fonds accompagnera les nouveaux médias au cours de leurs trois premières années d'existence, a-t-elle détaillé, soulignant la "fragilité" et la "précarité économique" de l'"écosystème" de la presse.

Citant par ailleurs les exemples de Charlie Hebdo et du Monde diplomatique, Mme Pellerin a annoncé vouloir étendre les aides directes aux hebdomadaires, mensuels et trimestriels d'information politique et générale qui n'en bénéficiaient pas jusqu'ici. Une promesse qui "sera effective dès cette année" et devrait concerner jusqu'à une cinquantaine de titres, pour un montant de 5 millions d'euros environ. Au total, les aides publiques à la presse représentent annuellement "plus de 820 millions d'euros, dont 130 millions d'aide directe et 130 millions d'aide postale", a rappelé Fleur Pellerin.

Le SEPM réagit

Dans un communiqué, le Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) a fait part de sa « satisfaction » face au « principe de neutralité fiscale pour la presse, appliqué aux contenus comme aux supports ». Selon lui, la réforme des aides à la presse annoncée « dessinent un projet volontaire et cohérent d'accompagnement de la filière dans ses enjeux d'innovation et de construction de nouveaux modèles économiques ». Qualifiant de « bienvenue » la création d'une nouvelle catégorie de « presse de la connaissance et du savoir », il tient cependant à souligner la nécessité d’un débat « ouvert et objectif » sur le sujet. Il appelle également de ses vœux la « recherche d'un équilibre durable dans la définition d'une nouvelle économie du transport postal de presse ». La profession salue enfin la décision prise « d'un élargissement de l'aide au pluralisme aux magazines d'opinion ».

Le rapport « Charon »

Dans son rapport « Presse et numérique - L’invention d’un nouvel écosystème » remis à la ministre, Jean-Marie Charon (photo) plaide pour que l'État aide davantage l'innovation, financièrement et juridiquement, afin de soutenir une presse dont le modèle économique a été "cassé" par le numérique. Selon lui, dans ses conclusions, « trois notions s’imposent qui dessinent des contours possibles de l’action publique » : l’écosystème, le couple innovation-expérimentation et l’attractivité. Il propose donc notamment, la combinaison des financements publics avec la recherche de financements mixtes.  « L’expérience du Fonds Google, devra être évaluée, sachant qu’il serait souhaitable de voir converger une pluralité de sources de financements vers un Fonds, ou des dispositifs (fiscaux notamment) d’aides à l’innovation qui prennent en compte aussi bien l’éditorial, que la commercialisation et les dispositifs techniques nécessaires » souligne-t-il. « Ce fonds ou ces aides au financement d’accompagnement de l’innovation devraient s’adresser aux différentes formes d’entreprises de presse et de numérique d’information, ainsi qu’aux start-up et agences contribuant à la production d’information, voire au cas par cas à des projets de pure players de contenus pouvant avoir un fort impact sur l’écosystème ». L’Etat pourrait même favoriser, en réunissant les conditions nécessaires, « la création d’incubateurs accueillant les pure players d’information, les labs des entreprises de presse, ainsi que les start-up contribuant à la production d’information, à la fois à Paris et en région », relève-t-il. En outre, « une réflexion sur les potentialités et les modalités de la notion de crowdfunding serait une contribution importante », insiste-t-il. De même, une initiative conjointe des pouvoirs publics doit, selon M. Charon, « s’employer à construire des passerelles, des formes de relations à imaginer entre les formations des différents métiers concourant à la production de l’information ». L’intégralité du rapport est consultable ici.

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