Le programmatique en cinq questions

A l'occasion de la parution du Hors-Série de CB News sur la publicité digitale, La Matinale vous propose de revenir sur quelques-uns des thèmes abordés dans ce numéro réalisé en collaboration avec le Syndicat des Régies Internet (SRI) et toujours disponible dans les meilleurs kiosques.

1 - Qu’est-ce que le programmatique ?

L’Observatoire de l’e-Pub l’e-pub du SRI, réalisé par PwC, en partenariat avec l’UDECAM a retenu cette définition du programmatique : des inventaires vendus via une mise en relation automatique entre acheteurs et vendeurs, qui inclut tous les modèles de ventes automatisés -garanti/non garanti, prix fixe/RTB, Private Market Places/enchères ouvertes, qu’on parle de plateforme en self-served ou de Trading Desk.   

Une définition large qui autorise toutes les interprétations, selon qu’on soit régie, éditeur ou annonceur. Alix Pandrea, directeur général adjoint du Pôle Digital de Lagardère Active, fait ainsi la distinction entre deux types de programmatique : « le RTB, utilisé par la régie en mode semi blind via la Place Media, et le programmatique direct, vendus par nos commerciaux, avec des URL transparentes ». Arthur Millet, directeur général de la Place Media, fait lui le distinguo entre : « le marché du garanti, dans lequel l’annonceur achète des inventaires à l’avance avec la garantie qu’il les aura bien. Et celui du non garanti, où les éditeurs mettent leur inventaire sur un marché aux enchères ouvert comme le RTB ». Selon Fabien Scolan, directeur advertising de Le Bon Coin, le programmatique est un autre canal de vente qui permet un ciblage spécifique : « la publicité est en train de connaître ce que la Bourse a connu il y a 25 ans, en passant de la corbeille avec des échanges papiers à une plateforme automatisée du type Euronext ou Nasdaq ».  

  

2 - Le RTB a été critiqué pour ses inventaires peu valorisants. Quelle est la situation aujourd’hui ?

« C’est vrai, il s’agissait principalement d’inventaires secondaires. Et les transactions manquaient de transparence, d’où la défiance des annonceurs branding. Les éditeurs premium, eux, étaient frileux à cause du souci de cannibalisation de leur canal de vente classique » reconnaît Sophie Poncin. Pour Aurore Domont, présidente de Media.figaro : « le RTB a été pour nous un moyen de valoriser nos invendus. Ça nous a permis d’apprendre. Mais dans notre cas, invendus ne veut pas dire pas sans valeur. C’est aussi et surtout une nouvelle approche du médiaplanning ».

Depuis, la situation s’est nettement améliorée, et RTB comme programmatique ne sont plus synonymes de mauvaise qualité des inventaires. « Qui dit programmatique ne dit pas dévalorisation des inventaires, bien au contraire. Nos CPM nets sont plus élevés qu’auparavant grâce à la Place Media et à notre market place en marque blanche », estime Alix Pandréa. Erwan Le Page, directeur général d’Audience Square, compare les invendus proposés via le RTB aux offres commerciales de dernière minute des journaux et magazines : « en presse, les offres de bouclage ne sont pas indignes. C’est la même chose pour le RTB. De plus, au début, les formats plus événementiels comme les  habillages, les footer, la vidéo, etc. n’étaient pas présents  ». Pour Philip Schmidt, directeur exécutif Prisma Média Solutions. « Avec le lancement de notre place de marché premium, PrismAdex, on répondra à une attente de plus en plus forte des annonceurs d’efficacité, de maitrise des audiences engagées et de fluidité, dans des contextes garantis et émergents. » 

3 - Le programmatique, créateur de valeur ?

CPM très bas, inventaires peu qualifiés, manque de transparence : l’achat programmatique est réputé moins créateur de valeur que la vente traditionnelle et les opérations spéciales. Une idée reçue selon la plupart des intervenants du marché, surtout depuis qu’est apparue la possibilité d’ajouter à ces transactions automatisées de la data qualifiée via les DMP. « Environ 30 % de nos CPM sont équivalents à ceux des ventes garanties. À condition de remplir les KPI’s suivants : visibilité, audience, - emplacement, engagement. Il nous arrive d’avoir des dispositifs RTB avec un CPM de 10 euros », explique Arthur Millet. Avis partagé par Véronique Pican : « en tant qu’éditeur, si on a des inventaires et de la data qualitative, on a tout intérêt à opérer dans un monde d’enchères. Sur un segment comme la vidéo, les inventaires vendus en programmatique peuvent soutenir la comparaison avec ceux qui se vendent en manuel ». Pour Fabien Scolan, cette problématique de la valeur concerne surtout les éditeurs. « Les univers bien identifiés et puissants comme Facebook ou le Bon coin, avec ses 30 milliards d’impressions publicitaires, n’ont pas de problème de brand safety. Pour nous, l’inventaire programmatique a autant de valeur que le gré à gré ». Aurore Domont conseille de « faire baisser la pression publicitaire, en diminuant le capping pour augmenter les CPM ». Quant à Sophie Poncin, elle estime que cette création de valeur est déjà une réalité : « les enchères jouent leur rôle de revalorisation du CPM. Notre place de marché Orange Ad Market connaît une croissance à deux chiffres. »

4 - Le programmatique est-il compatible avec les campagnes de branding ?

Le programmatique display ne sert pas uniquement à vendre des impressions publicitaires en nombre, il peut aussi appuyer des campagnes d’image et de marque (branding). « Nous venons en soutien d’une campagne de branding mais avec le RTB, nous vendons d’abord de l’audience. Le programmatique permet d’avoir un reach considérable avec un grand nombre d’inventaires. Les annonceurs y viendront de plus en plus, avec des logiques data, et y trouveront un intérêt en termes de ROI ou de  ciblage », analyse Arthur Millet. Pour Erik-Marie Bion, « depuis que les formats de branding (grands formats display et vidéo en premier lieu) sont disponibles en RTB avec les outils de tracking, et sachant que le programmatique permet d’optimiser en temps réel sur les KPI’s désirés tout en gérant la couverture et la répétition à l’échelle de la campagne, toutes les clés sont réunies pour gérer n’importe quel genre de campagne ». Aurore Domont est-elle aussi convaincue que l’achat programmatique est tout à fait compatible avec une campagne d’image : « avec notre ad server fullstack nous pouvons faire 100 % de part de voix sur la homepage du figaro.fr. L’objectif n’étant pas d’acheter à bon marché mais d’être diffusé sur la bonne personne ». « Un annonceur très branding qui veut acheter en RTB n’a aucun souci pour piloter les mêmes critères qu’en garanti. Toutes les planètes sont bien alignées », conclut Sophie Poncin.

5 - Deal id : le retour du mediaplanning ?

Les Deal ID sont un nouveau mode de transaction qui rassure les annonceurs encore frileux vis-à-vis d’un mode de vente aux enchères ouvertes à tous. Techniquement, il s’agit d’un code transmis par l’éditeur au trading desk qui permet par exemple, de fixer un prix minimum (floor) de garantir une URL ou encore de garantir un first look (première impression) à l’acheteur, même si le deal ne lui garantit pas l’achat final de cette impression. Il ne garantit pas non plus à l’éditeur que l’impression lui sera acheté, puisqu’on reste dans le cadre du non-garanti côté éditeur. Le Deal ID peut aussi être enrichi de data ciblées apportées par l’éditeur, ce qui augmente encore la valeur du CPM.  Entre mode gré à gré et RTB, les Deal ID sont un modèle hybride qui ont rapidement trouvé leur place au sein du programmatique (de 15 à 30 % du chiffre d’affaires), même si certains restent sceptiques. Pour Fabien Scolan, de Le Bon Coin : « avec le Deal ID, on accède à une vraie granularité de ciblage et une vision du client unifiée ». Véronique Pican ajoute que « les annonceurs veulent du programmatique transparent et du brand safety. Le Deal ID, c’est ça. Mais il reste une étape à franchir : le reporting en temps réel via des tableaux de bord dynamiques ». 

À lire aussi

Filtrer par