PME : pourquoi encore tant de frilosité avec le marketing digital ?

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Le digital est devenu incontournable pour toute entreprise souhaitant rester compétitive. Pourtant, de nombreuses PME opérant sur des secteurs BtoB restent réticentes à activer pour leur marketing ce levier particulièrement efficace. Pourquoi une telle hésitation ?

Ils sont souvent dubitatifs et paraissent près de leurs sous dès qu’on leur parle de marketing digital. Eux, ce sont les directeurs financiers et les directeurs généraux des PME dans le BtoB. Côté agences, c’est l’incompréhension. Elles sont évidemment convaincues que la transformation digitale des pratiques marketing des PME est une priorité absolue - et rentable -  et comprennent mal les freins à la dépense des dirigeants. Pourtant, je pense qu’ils se justifient. Voici donc quatre freins que nous, agences digitales, nous nous devons de lever.

La complexité technique

Selon une étude du cabinet Forrester, 73 % des dirigeants d'entreprise estiment que la technologie marketing évolue plus rapidement qu'ils ne peuvent la suivre. Prenons l'exemple de Google Ads : en 2019, la plateforme a effectué plus de 3 200 modifications à son interface et à ses algorithmes.

Mais ce n'est pas le seul acteur à évoluer à une vitesse vertigineuse. LinkedIn, par exemple, a introduit une série de nouvelles fonctionnalités pour les marketeurs, comme les événements en direct et les nouvelles options de ciblage publicitaire.

TikTok, quant à lui, est passé d'une application de divertissement à une plateforme incontournable pour le marketing de marque en un temps record. Et n'oublions pas X (ex. Twitter), qui, depuis son rachat par Elon Musk, a connu des transformations profondes, introduisant de nouvelles fonctionnalités et modifiant ses algorithmes. Pour les non-initiés, suivre le rythme de ces évolutions constitue un défi colossal. L'investissement dans la formation continue et la veille technologique n'est plus une option, mais une nécessité pour rester compétitif.

Le défi RH

Le marketing digital, en plein essor, a vu une augmentation de 61 % des offres d'emploi entre 2017 et 2020, selon LinkedIn. Pourtant, les PME BtoB font face à un défi majeur en matière de recrutement. Souvent, elles proposent des missions aux contours trop larges, cherchant des "moutons à cinq pattes" capables de gérer de multiples aspects du marketing digital.

Ces attentes, couplées à des salaires souvent moins compétitifs, rendent la tâche ardue. Les meilleurs talents, en quête de spécialisation, de progression professionnelle et de sens, sont naturellement attirés par les grands groupes, les startups innovantes ou les agences digitales. Ces structures offrent non seulement des postes mieux définis, mais aussi une diversité d'expériences, permettant aux professionnels de ne pas être cantonnés à un seul secteur.

De plus, à l'ère post-Covid, les aspirations des générations Y et Z ont évolué, avec une quête de sens et de bien-être au travail devenue primordiale. Les PME doivent donc repenser leur proposition de valeur employeur pour attirer et retenir ces compétences essentielles. Un exercice dans lequel elles sont encore souvent trop réticentes à investir.

La synergie organisationnelle

Historiquement, les départements marketing et commercial ont souvent fonctionné en silos, chacun poursuivant ses propres objectifs et utilisant ses propres outils. Pourtant, le digital exige une collaboration étroite entre ces deux entités. La mise en place d'une stratégie digitale intégrée nécessite une vision commune et une communication fluide entre ces départements.

Un exemple frappant de cette déconnexion est l'absence fréquente d'une stratégie d'account based marketing (ABM) en aval du funnel digital. L'ABM, qui cible spécifiquement des comptes ou entreprises clés, nécessite une collaboration étroite entre le marketing, qui génère des leads qualifiés, et les commerciaux, qui les convertissent. Sans stratégie ABM, les efforts des équipes marketing ne seront pas pleinement exploités par les ventes.

Cette déconnexion accentue le fossé entre les deux départements, rendant la conversion de prospects en clients plus difficile et moins efficace. Il est donc essentiel pour les entreprises d'intégrer l'ABM dans leur stratégie digitale pour assurer une transition fluide entre les étapes du funnel et maximiser le ROI de leurs opérations.

Les enjeux financiers

La plateforme HubSpot rapporte que 40 % des entreprises ne parviennent pas à quantifier le ROI de leurs efforts de marketing digital. C'est un défi majeur, car sans mesure claire, comment justifier les investissements ?

L'arrivée de Google Analytics 4 (GA4) en est un exemple frappant. Cette nouvelle version, bien que puissante, bouleverse les habitudes de mesure d'audience web des entreprises. Avec une interface repensée et une approche axée sur l'utilisateur plutôt que sur la session, GA4 demande une réadaptation des compétences et une nouvelle courbe d'apprentissage.

Par ailleurs, la confiance en Google est ébranlée par ses problèmes récurrents avec le RGPD. Cette situation a poussé de nombreuses entreprises à se tourner vers d'autres outils, comme Matomo, qui offrent une meilleure conformité en matière de protection des données. Ces transitions vers de nouveaux outils nécessitent des ressources supplémentaires, tant en termes de temps que de formation.

Enfin, un obstacle majeur demeure le manque de culture data chez de nombreux responsables communication. Même avec les meilleurs outils à disposition, si les responsables ne sont pas formés à l'analyse et à l'interprétation des KPIs, les données restent sous-exploitées. Cette lacune limite la capacité des entreprises à tirer des insights précieux de leurs efforts de marketing digital et à optimiser leur stratégie.

Alors, on fait quoi ?

Face à la complexité croissante du paysage digital, les PME BtoB se trouvent à la croisée des chemins. Les défis techniques, humains, organisationnels et financiers sont réels mais ils ne sont pas insurmontables. C'est là que les agences de communication digitale ont clairement un rôle à jour, non seulement comme des experts opérationnels, mais surtout comme des partenaires stratégiques.

Historiquement, ces agences ont été perçues principalement pour leur expertise en matière de conseil, de production et de formation. Elles déchiffrent les tendances, maîtrisent les outils les plus récents et forment les équipes à ces nouvelles compétences. Cependant, à l'ère du digital intégré, leur rôle doit évoluer.

Il est impératif que nous, agences, étendions notre accompagnement au-delà des aspects purement digitaux. Nous devons aider nos clients à repenser leurs structures organisationnelles, à favoriser la synergie entre leurs équipes marketing et commerciales, à instaurer une culture data solide. Bien que cela puisse sembler hors de nos domaines traditionnels, c'est une étape nécessaire pour garantir le succès à long terme de nos clients dans leur pleine appropriation du monde digital.

(Les tribunes publiées sont sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas CB News).

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