Tendances 2019 : la vertu, le Brand & The City et l’Intimité élastique

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Pour sa 12ème édition, la traditionnelle présentation des « Tendances 2019 » de M6 Publicité s’est une fois encore adonnée au croisement des signaux faibles sur des initiatives marketing, citoyennes ou encore des marques avec des tendances sociologiques afin de mieux comprendre ce vers quoi va la consommation. Vaste sujet qui s’appuie notamment sur les observations et la veille de la régie, mais également sur l’Observatoire SocioVision d’octobre 2018 et le nouveau Baromètre des territoires réalisé par l’Institut Montaigne en janvier dernier. En creux, l’ambition de « nourrir nos clients agences et annonceurs avec des insights », nous a expliqué Kim Younes, directrice marketing, innovation et communication de M6 Publicité. Car le contexte est aujourd’hui à « l’ambivalence ». D’un côté, les Français portent des sentiments négatifs liés l’exclusion et l’injustice, l’impression pour les parents que leurs enfants vivront moins bien qu’eux. La crainte, également, d’assister à la remise en cause d’acquis sociaux (+6 points en un an), à 76%. 70% se disent même inquiets pour l’avenir de la France, même si le Français est historiquement pessimiste. La crise des Gilets Jaunes est aussi passée par là. 2018 même très « toxique », selon le dictionnaire Oxford qui en a fait le mot de l’année. Mais, de l’autre, il y a de l’espoir : 73% des Français font le récit d’une vie heureuse. Ils mettent en avant un « rapport apaisé à la diversité, il y a moins de crispation à l’idée d’une ouverture des frontières », souligne Mme Younes. Puis, les gens se sentent bien dans leur vie privée (+9 points en un an) auprès de la famille et des proches, et assument pleinement que c’est l’une de leurs priorités, un point « essentiel » de l’étude, relève-t-elle. La fraternité est à cet égard le sentiment qui progresse le plus. « Le projet collectif a peu à peu cédé sa place à de micro-projets collectifs », souligne-t-elle encore. Et ce qui rassemble tout cela, c’est « la confiance ». Il y a en effet un besoin d’éthique, de raison, de responsabilité qui s’empare des marques pour transformer et améliorer la consommation, et ainsi reconquérir la confiance des consommateurs. La science est également remise au centre des besoins de la société, tout comme le désir « de se respecter un peu plus », insiste Kim Younes. C’est-à-dire la volonté de « davantage respecter les imperfections, nos failles, nos rythmes biologiques… ». Alors ? Ce sont trois grandes tendances structurelle qui émergent en 2019, et sous-tendent la consommation, selon M6 Publicité : la « vertu », le « Brand and the city » et l’ « intimité élastique ».

Vivre mieux...

Ainsi, la vertu n’est-elle plus un devoir, mais un mode de vie. La vertu « c’est la responsabilité, l’éthique et la raison. Les marques et les individus remettent en cause leurs façons de faire et de vivre pour faire infléchir les directions que l’on prend pour vivre mieux », explique la directrice marketing et innovation. Mais qu’est-ce que faire le bien, c’est quoi être une bonne personne alors que le numérique serait à l’origine de bien des maux ? L’opérateur de téléphonie Three UK joue ainsi la carte du désamorçage dans un spot bien senti, en mode indispensable, pour une bonne utilisation de ses appareils.

Nouveau, également, la mise en scène des bonnes pratiques du quotidien à l’image de l’opération #5minutebeachcleanup qui prône le nettoyage d’une plage par ses utilisateurs, ou le « plogging », mode du ramassage de détritus en faisant son jogging. D’une pierre, deux coups. « L’idée d’être plus vertueux, c’est cool », souligne Kim Younes. Mais le vertueux peut être également festif, avec la « sober party » qui entraine les plus jeunes générations dans les fêtes sans alcool. Mais pour les marques historiques, comment s’insérer dans ces nouvelles tendances ? Comment transformer son rôle ? Comment migrer vers le « brand purpose » ? Fleury-Michon s’y essaie depuis quelques années déjà, à l’image de ses campagnes engagées ou encore la marque Barbie et son opération « close the dream gap » contre stéréotypes sexistes

Du côté du numérique, la prise de conscience est peut-être plus brutale, avec la volonté de prendre en main la question de l’éthique. Des postes de chief ethics officer sont même créés chez L’Oréal ou Aéroports de Paris. Et puis, l’usage trop important, ou moins maitrisé de la High-Tech peut entrainer des effets secondaires sur la santé, sur la vie sociale. La marque chinoise Huaweï s’est emparée à dessein du problème, pointant les dérives. Et sa réponse.

Et la grande conso ? Si la consommation des produits reste au cœur, le sujet prégnant est aujourd’hui celui de l’emballage. « Nous avons pris conscience que le recyclage ne fera pas tout », relève Kim Younes. Dès lors, l’apparition de la communauté des « pré-cyclers » qui ont pour principe d’éviter le plastic à usage unique. A Amsterdam, même, le magasin Ekoplaza propose un rayon entier (700 références) à zéro plastic alors que Loop, un site de e-commerce, ambitionne de réinventer la consigne. Plus loin de nous (quoique), le MIT a quant à lui imaginé un packaging « vivant », à base de bactéries qui dévoreront l’emballage, pour la marque Puma tandis que l’ADN de synthèse, qui est aujourd’hui maitrisée, se développe dans des secteurs tels que la cosmétique, la mode, le cuir, la soie, le caoutchouc, le parfum, les additifs alimentaires ou encore… le stockage de data.

Dans ce contexte, aussi, les marque se veulent plus inclusives, prêtes à créer des produits spécifiques pour leurs différentes communautés : NBA Store aux US qui fournit aux autistes une panoplie de produits leur permettant de se protéger des bruits les entourant ou encore Starbuck et l’une de ses boutiques dont le staff est composé de sourds. Ou Sephora proposant aussi un atelier maquillage à l’attention de personnes transgenres. Au Royaume-Uni, une campagne Royal Air Force qui lutte contre le stéréotypes féminins a ainsi été désignée meilleure campagne inclusive en 2018.

Mais attention, pointe l’étude, à ce que l’intelligence artificielle (IA) ne reproduise pas les stéréotypes, les biais humains.

Le laboratoire du futur

Brand and the city, la seconde grandes tendances décelée par M6 Publicité, est l’idée que la ville est plus que jamais le laboratoire du futur, instillant ainsi le principe de résilience qui permet de survivre et de se développer face à des chocs et des stress chroniques. Car trois constats peuvent être avancés : la population urbaine continue sa progression, la demande en local est de plus en plus forte et l’urgence climatique nous impose de repenser nos façons de vivre. Dès lors, « la ville va devoir s’adapter et abriter des innovations », indique Kim Younes. Les marques ont donc tout à gagner à prendre la parole de « façon différente ». En étant le partenaire des citadins, à écrire les « petites et grandes histoires de la ville », comme à Bondy où le footballeur-star Kylian MBappé s’affichait XXL sur les immeubles de la ville, comme en son temps Zinedine Zidane à Marseille ou Éric Cantonna à Manchester. Mais la High-Tech est également dans la ville (Google, Alibaba City Brain AI…) afin de repenser ses aménagements pour la rendre plus sûre. Uber envisage même à l’horizon 2023 la commercialisation de ses premiers taxis volant, « Uber Air », qui seront testés à Dallas et Los Angeles. Quoi qu’il en soit, la mobilité crée de nouveaux points de contact pour les marques. De nouveaux moments pour créer une relation avec elles. A la question, qu’allez-vous faire dans une voiture autonome ? 48% répondent communiquer, 43% lire, 37% dormir, 33% manger, 30% regarder des contenus vidéo…

Pour les marques, toujours, l’enjeu du dernier kilomètre est fondamental. Fedex propose ainsi le Fedex SameDay Bot, un robot transportant des marchandises quand Pepsico SnackBot déambule dans les campus universitaires américains chargé de produits healthy. Et parce que l’acheminement des denrées alimentaires dans les villes deviendra crucial, la ville devient « ville nourricière ». Une cité maraichère s’installe ainsi en région parisienne, à Romainville, ou le 18ème arrondissement de Paris abrite « La Caverne » qui propose une agriculture urbaine et pérenne.

Montrer tout ce que l'on veut cacher

Enfin, 3ème tendance : l’intimité élastique. Car nous avons un nouveau rapport à l’intime. Parfois nous voulons le cacher, parfois le montrer. « C’est l’occasion pour les marques de créer de nouveaux marchés ou tout simplement une nouvelle façon de s’adresser à leurs consommateurs », explique Mme Younes. Avec 2 insights : comment est-ce que je fais pour m’insérer dans les espaces intimes en respectant la vie privée ? Alors que les produits vont aux clients (livraison, enceintes connectées…), comment la marque peut-elle les faire (re)venir en magasin ?

Dans les faits, le rapport à l’intime passe par un nouveau rapport au corps. « Nous nous rendons compte que ce qui pouvait être tabou, on se le rapproprie comme extension de soi », pointe Kim Younes. Ainsi, C&C Clean and Clear a-t-il créé un pansement très coloré et donc visible tandis que Hims aborde résolument les problème d’érection alors que les menstruations qui sont aujourd’hui quasiment revendiquées. Pour décomplexer toutes les parties du corps, Bawdy lance même ses masques pour fesses. Mais la question de la représentation de soi demeure… Museum of ice cream tente une réponse en proposant à ses visiteurs une salle spécifique où ils pourront se photographier tandis que l’appli Le Click, sorte d’Uber de la photo, propose des photographes géolocalisés, ou la marque hôtelière Ibis qui s’occupe de gérer votre Instagram.

Puis, la tendance aux petits bonheurs privés « n’est pas prête de s’arrêter », assène la directrice marketing et innovation de M6 Publicité. Dans cette « ode à la douceur », place aux parterres de surfaces chauffantes, aux parfums-odeurs que l’on aime particulièrement avec la marque Scentiments. Et personne n’est oublié dans ce mode douceur, pas même le public jeune très « pet friendly », dans une campagne Burger King.

Dans cette forme de protection, de retour sur soi, d’apaisement, 67% des Français préfèrent rester chez eux pour voir leurs amis. Et ce bien-être au foyer, des marques comme Peloton a bien compris le parti qu’elle pourrait tirer de ces tendances en proposant un vélo d’intérieur directement connecté à une salle de sport et ses cours collectifs, ou même un miroir connecté pour adopter les bons mouvements. La marque Chill House, pour sa part, s’est lancée dans les tenues détente chez soi. Une douceur et une émotion un peu (beaucoup) bousculées par l’IA. Comme avec l’appli Replika, véritable chatbot qui apprend à vous connaitre pour créer votre meilleur(e) ami(e) ou Samsung, qui dans un spot, met en avant ses capacités qui va jusqu’à remplacer… une maman. Un futur ou un "tout de suite" quelque peu effrayant.

(Âme sensible s’abstenir)

A retenir

La Vertu : objectif de durabilité et l’idée de l’inclusivité

Brand & the city : laboratoire du futur pour une ville qui va devenir de plus en plus résiliente pour répondre aux problèmes environnementaux

Intimité élastique : montrée ou cachée… un nouveau territoire pour les marques pour aider les gens à s’exprimer

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