La « shrinkflation » dans le collimateur du Gouvernement et des distributeurs

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La "shrinkflation", qui consiste à masquer la hausse des prix en réduisant les quantités vendues, est devenue la nouvelle cible de la lutte contre l'inflation alimentaire, Bercy et les distributeurs poussant les industriels à la transparence.

Cette pratique (du verbe anglais shrink, rétrécir) est légale à condition que la mention du poids de la denrée soit modifiée. Mais elle peut induire en erreur les consommateurs puisque l'emballage reste semblable et le prix du produit identique, alors même que la quantité vendue est moindre. La pratique, qui peut concerner de nombreux produits de grande consommation, est "encore marginale", de l'avis de Michel-Edouard Leclerc, président du comité stratégique du groupe de distribution Leclerc, interrogé vendredi sur BFMTV/RMC. Elle est néanmoins pointée du doigt alors que les prix alimentaires ont bondi de 11,1% sur un an en août, même si le rythme de hausse ralentit un peu. "Ce n'est pas des centaines et des centaines de produits mais c'est vrai qu'il y a certaines multinationales qui jouent à ce jeu", a déclaré sur BFMTV Michel Biero, directeur exécutif des achats et marketing de Lidl qui qualifie la pratique de "vol". Dans un sondage publié mercredi dernier révélant que près de quatre Français sur cinq "se serrent encore la ceinture", 72% des personnes interrogées ont constaté moins de quantité de produit dans certains emballages vendus au même prix ou plus cher qu'avant. "Cette pratique est une manière peu transparente de faire monter le prix des produits et donc je soutiens la proposition de Bruno Le Maire qui consiste à rendre obligatoire une information sur les modifications de contenant", a déclaré Michel-Edouard Leclerc. Jeudi, le ministre de l'Économie a confirmé que dans le texte de loi qui sera présenté début octobre, visant à avancer les négociations commerciales entre distributeurs et industriels, "il y aura une disposition qui obligera les industriels à faire figurer de manière très visible la réduction de contenu quand ils gardent le même packaging".

De son côté la chef des députés Insoumis Mathilde Panot a annoncé fin août déposer une proposition de loi visant à considérer le principe de "shrinkflation" comme trompeur et donc interdit.    "Cette pratique déloyale provoque au mieux une multiplication de déconvenues aussi surprenantes que désagréables lorsque le consommateur s'en rend compte. Au pire, elle accroît les difficultés financières de millions de Français", dénonce le texte de LFI. La ministre déléguée chargée des PME, du commerce, de l'artisanat et du tourisme Olivia Grégoire a déjà missionné le Conseil national de la consommation pour réaliser une enquête sur cette pratique. Cette analyse doit être achevée "au plus tard le 31 mars 2024", selon la lettre de mandat du Conseil national de la consommation consultée par l'AFP. Sans attendre une loi, le PDG de l'enseigne Carrefour, Alexandre Bompard, a quant à lui annoncé mercredi sur France 5 que "dès lundi" ses magasins afficheront les produits sur lesquels il y a de la "shrinkflation" avec l'indication "Ce produit a vu son contenant baisser et son prix augmenter". "C'est une bonne idée", a commenté M. Leclerc. Interrogés en juin par l'Insee, 47% des ménages ont déclaré avoir changé leurs habitudes de consommation alimentaire en raison de l'inflation, soit 10 points de plus en six mois: moindres quantités, changement de gammes de produits, diversification des magasins pour les courses. Cette situation a poussé le gouvernement à prévoir un texte de loi en octobre pour avancer les négociations commerciales entre industriels et distributeurs de l'agroalimentaire avec l'objectif de faire baisser les étiquettes en rayons. Fin août, il avait annoncé avoir déjà obtenu une baisse ou un blocage de prix sur 5.000 références.

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