Nicolas de Tavernost (groupe M6) prépare sa sortie

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Nicolas de Tavernost, président du directoire du groupe M6

(© thierry Wojciak/CB News)

Il quittera son poste de président du directoire du groupe M6 qu’il occupe depuis 2000 le 23 avril prochain, après 37 ans au sein de la filiale de Bertelsmann. Et Nicolas de Tavernost n’a rien perdu de sa verve et de ce sens de la punchline qui le caractérise. Il en a encore fait montre en tant qu’invité (pour la 3ème fois) du traditionnel déjeuner de l’Association des journalistes médias (AJM) vendredi.

Et à ceux qui le voit d’ores et déjà rebondir dans une nouvelle fonction, le dirigeant ne semble certain de rien, ou en fait-il mine auprès de l’assemblée de près d’une trentaine de journalistes présents : « je réfléchis, il n’est pas impossible que l’on se revoie. Mais j’aurais un bureau, c’est certain ». Concernant la rumeur le voyant être éventuellement propulsé à la tête de la future holding de l’audiovisuel public, M. de Tavernost trouve l’hypothèse « exotique », considérant ne pas avoir la « patience » nécessaire ni la « culture » du secteur public. Il ne se voit pas non plus rejoindre le groupe de l’armateur CMA CGM de Rodolphe Saadé qui a fait son entrée au sein du capital du groupe M6. Accompagné lors de cet échange par l’écrivain Alexandre des Isnards (« L’open space m’a tuer », « Facebook m’a tuer », « La visio m’a tuer », etc.), le patron de M6 annonce sa volonté de travailler avec lui pour la rédaction d’un livre… dont il n’a pas encore le sujet.

Droits TV : la Coupe du monde de football est une bonne affaire

En attendant, interrogé sur les sujets chauds, Nicolas de Tavernost ne se cache pas, comme d’habitude, derrière son petit doigt. Si la publicité pour le cinéma à la TV a été autorisée par décret ce week-end et que celle des livres est en phase expérimentale pour deux ans, il se dit en revanche « pas très optimiste », sourire en coin, sur un changement de réglementation pour la publicité de la distribution via le petit écran. De même, il réitère son incompréhension de voir les plateformes numériques ne pas être considérées comme des éditeurs : « elles ont des règles, j’appelle cela être un directeur de la publication », assène-t-il. Concernant la TNT payante, « elle aura l’avenir que Canal+ lui donnera », pointant au passage les auditions récentes de la commission d’enquête TNT de l’Assemblée nationale qui n’ont, selon lui, que « peu parlé de l’avenir de la TNT, de la fin de ces fréquences ». Et de s’interroger tout haut : « quel est le pouvoir de la distribution ? Comment tout cela sera distribué ? Qui aura le pouvoir de changer, de proposer ou d’imposer les numérotations des chaines ? Quel sera le pouvoir de Canal+, de Free, d’Orange, de SFR ? ».

Grand vainqueur récent des droits TV des Coupes du monde de football 2026 et 2030, le groupe M6 et son encore président du directoire se veut rassurant : « c’est une bonne affaire. Je n’ai aucune inquiétude sur la rentabilité de l’événement pour nous ». A la question de savoir si M6 devra ou voudra sous-licencier une partie des matches, Nicolas de Tavernost adresse un conseil à son successeur désigné David Larramendy, actuel patron de M6 Publicité : « garde ce que l’on a ». Et si TF1 n’est pas co-détenteur de ces droits avec M6 comme c’est l’habitude depuis plusieurs années, c’est que « notre compétiteur n’a pas cru qu’on y allait, c’est tout, et pas autre chose malgré tout ce qu’il dit », assure-t-il. Toutefois, France Télévisions aurait d’ores et déjà tâté le terrain auprès de M6 pour récupérer des matches, indique-t-il alors que sa présidente Delphine Ernotte, interrogée dans l’édition de samedi du Figaro, indique que « Nicolas de Tavernost ne m’a pas indiqué sa volonté » d’en revendre.

Nicolas de Tavernost a par ailleurs assuré que M6 prendrait ses « responsabilités » au sujet de ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler « l’affaire Stéphane Plaza », en fonction du jugement de son animateur-vedette accusé de violences sur deux anciennes compagnes. « On a fait ce qu'il fallait en enquête interne, chez (le groupe de production) Mediawan et à M6. Au plan professionnel, il n'y avait pas de reproche qui puisse justifier sa mise à l'écart, c'est clair et net », a-t-il justifié. Stéphane Plaza sera en effet jugé par le Tribunal correctionnel à la fin de l'été pour des violences physiques et/ou psychologiques. Placé sous contrôle judiciaire dans l'attente de son procès, il a récusé fermement ces accusations. « On n'est pas policiers, on n'est pas juges, on regarde, on est très attentifs », a-t-il ajouté. Nicolas de Tavernost a rappelé avoir écarté dans le passé un juré de l'émission « La France a un incroyable talent », le Canadien Gilbert Rozon, ainsi que l'acteur français Ary Abittan, évincé d'une série après avoir été accusé de viols. « Les deux ont été blanchis », notamment Ary Abittan en première instance mardi dernier, a-t-il relevé, confiant que les avoir enlevés de l'antenne n'était pas la chose « dont (il est) le plus fier ». Dans le cas de M. Plaza, « il n'y a aucune plainte pour viol ». Et, selon le patron de M6, « quand vous enlevez quelqu'un de l'antenne et si après il est blanchi, c'est horriblement difficile le remettre ».

Patrick Le Lay et Maxime Saada ont impressionné

Dans le rétroviseur de son règne de 24 ans à la tête du groupe M6, Nicolas de Tavernost laisse poindre un regret : évidement, la non-fusion TF1-M6 qui est à ses yeux « une grosse erreur », même si aujourd’hui cette phase d’incertitudes de deux ans est derrière lui. Et le marché, quoi qu’il en soit, devra faire face à « des consolidations, parce que c’est une nécessité », alors que la loi dite des 5 ans pour le changement de contrôle d'une chaîne "fossilise" l'audiovisuel. Puis, sur cette période à la présidence du directoire, deux personnalités l’ont « impressionné », même s’il y en a d’autres, souligne-t-il. D’abord Patrick Le Lay, président de TF1 de 1988 à 2008, qui « m’a embêté, mais avec qui l’on s’entendait sur les gros dossiers ». Puis, pour lui, le parcours du président du directoire du groupe Canal+ Maxime Saada est « exceptionnel ». C’est « quelqu’un d’international, qui aime la production, qui a une intelligence de la distribution. Souvenez-vous de ce que disait les gens de l’avenir Canal+ il y encore 4-5 ans… ».

La TV restera linéaire

Sur son successeur proposé à la présidence du directoire à la fin de ce mois, David Larramendy, selon Nicolas de Tavernost, « c’est un gars doué ». A la fois ingénieur de formation et commercial, « une tête bien faite », avance-t-il. Il a « fait la preuve qu’il sait s’adapter alors qu’il ne connaissait rien à la publicité ». Quant à savoir, qui lui succédera à la tête de la régie, le nom devrait être connu lors de l’Assemblée générale du 23 avril, bien que celui de Hortense Thomine-Desmazures, actuelle directrice générale adjointe de M6 Publicité, chargée du digital, de l’innovation et du marketing, soit plus particulièrement avancé depuis plusieurs semaines, sans confirmation. En attendant, bon nombre de challenges attendent le futur dirigeant du groupe M6, comme notamment la baisse de la durée d’écoute on encore les performances du streaming qui devront être portées par la future plateformes M6+ dont la sortie est prévue en mai prochain. Si le digital occupe les esprits des professionnels de la TV, Nicolas de Tavernost en est certain : « 80% des ressources TV seront dans le linéaire. La télévision restera linéaire, j’en suis convaincu ! ».

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