Facebook sacrifie ses fans sur l’autel de la vidéo publicitaire

Jocelyn Jarnier, DG FullSIX Advertising, s'interroge sur les raisons qui ont poussé Facebook a introduire la vidéo publicitaire sur les murs de ses utilisateurs.

Le 17 décembre dernier, la firme de Menlo Park se décidait à ouvrir les walls à la publicité vidéo pour engranger quelques 500 m$ de revenus supplémentaires d’ici fin 2014. Pourtant, une semaine auparavant, Facebook venait de rentrer dans le Hall of Fame boursier du S & P 500.

Pourquoi « griller une telle cartouche » dans un contexte a priori si favorable ? Pourquoi risquer d’accroître encore la fuite de ses membres les plus jeunes (-25 % d’adolescents en trois ans aux USA – i strategylab 15/01/2014) ?

Serait-ce parce que ces adolescents se reporteront quoiqu’il arrive sur Twitter ou d’autres réseaux jugés plus « sociaux » ? La fanfare de gazouillis qui envahit depuis 6 à 8 mois les cours d’école le laisse penser, au même titre que l’engouement pour les Whisper, Snapchat et consorts.

Serait-ce l’avènement tant annoncé de Google + ? Si l’on en croit les chiffres, le réseau de Mountain View décollerait enfin avec 80 % d’utilisateurs actifs en plus sur 2013 et franchirait la barre des 300 millions.

Il est certain que Twitter et Google + font monter la pression sur le plus vieux des réseaux sociaux et le poussent à accélérer encore sa monétisation tant qu’il détient le leadership du nombre. Twitter parce qu’il incarne, au-delà d’un simple wall, un double danger : le potentiel d’un service d’instant messaging couplé à celui d’un moteur de recherche de trends. Google + parce qu’il offre toutes les possibilités d’un « Métaréseau », certes complexe à initier, mais capable à terme d’encapsuler et de gérer les fonctionnalités de tous les autres réseaux réunis.

L’arrivée de la publicité vidéo est donc plus qu’une simple nouveauté. Elle marque définitivement le passage du réseau de Mark Zuckerberg d’un modèle de croissance d’audience à celui de la monétisation de cette audience. Sous la poussée de ses concurrents occidentaux (sans parler des autres) et au risque de perdre de nombreux membres, voire même son âme, il semble avoir délaissé la promesse d’une publicité social 2.0, sur-mesure et non intrusive, au profit du bon vieux modèle de l’exploitation du trafic. Les jeunes fans de la première heure se détournent, les seniors arrivent en masse, avec des exigences de technicité et d’innovation beaucoup plus standard et des moyens financiers plus importants. C’est ce que l’on appelle l’arrivée à maturité d’un marché, au détail près qu’elle s’est faite en 10 ans et à l’échelle mondiale.

Une telle accélération de cycle laisse évidemment songeur sur la capacité du monde à fabriquer de la valeur dans la durée. Mais ça, c’est un autre débat.

Jocelyn Jarnier, DG FullSIX Advertising

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