Les CMO sont-ils les futurs CEO ?

Pour réussir à l’heure du multicanal, le CMO se doit donc de relever de nouveaux challenges ce qui en fait le véritable chef d’orchestre de la transformation digitale de l’entreprise. Par Guillaume de Roquemaurel, président d’Artefact

Si nous demandions à un panel de décideurs de décrire la fonction de CMO, nous retrouverions sur le papier une image déformée, forgée avant l’ère de l’omnicanal, des médias sociaux et du e-commerce. Le marketing, en effet, est bien souvent envisagé comme un centre de coût dont l’impact est mesuré à l’aune de KPI’s un peu bancals ce qui explique qu’il soit rarement considéré comme un « decision maker ». Outre ses résultats nébuleux, ce sont également le rôle et la posture mêmes du CMO qui cristallisent tous les fantasmes. Le directeur marketing serait le « Monsieur hémisphère droit » de l’entreprise dont le quotidien serait surtout rythmé par la gestion de ses agences. Avec un tel portrait, nul n’est étonné d’apprendre que les CEO ont rarement fait leurs classes au marketing. Ainsi, aux Etats-Unis, seul 8% des CEO recrutés entre 1990 et 2005 avaient une expérience marketing[1].

Mais ça c’était avant !  Le marketing s’est transformé en à peine une décennie, totalement révolutionné par l’avènement du digital. Et nous voyons depuis peu des profils marketing grimper en haut de la pyramide à l’instar de l’ancien Chief Brand Officer de McDonald’s, Steve Easterbrook, promu CEO il y a un peu plus d’un an. Mais pourquoi un tel virage ? Parce que le consommateur a changé. Hyper-connecté, submergé d’informations et séduit par la possibilité de pouvoir enfin converser avec les marques, ses attentes sont à mille lieues de celles auxquelles avaient affaire l’ancienne école du marketing. De fait, ils sont de plus en plus inaccessibles, plus difficiles à convaincre et à fidéliser. L’audience est une ressource en voie de raréfaction, c’est la fin des médias de masse. Pour réussir à l’heure du multicanal, le CMO se doit donc de relever de nouveaux challenges tels que connaître en profondeur les prospects et clients de l’entreprises pour personnaliser ses messages, peaufiner le parcours client et surtout cibler très précisément.

Cette nouvelle donne digitale en fait le véritable chef d’orchestre de la transformation digitale de l’entreprise. Et pour devenir une entreprise data-driven, il faut s’organiser, évangéliser,  former et recruter ou encore s’équiper en technologies. Le nouveau CMO se voit donc propulsé à la  tête de grands projets d’internalisation de technologies types DMP ou  CRM. D’ailleurs, Gartner[2] annonçait récemment que, d’ici à 2017, les CMP dépenseraient plus en technologies que les CIO eux-mêmes. Le marketing n’est  plus seulement un métier créatif, mais est devenu une véritable alliance d’art et de science.

Ainsi, grâce à la data, le CMO est désormais un contributeur clé à la croissance du chiffre d’affaire online. Parce qu’il connaît mieux les clients et prospects que les forces commerciales elles-mêmes, parce qu’il leur apporte le bon consommateur au bon moment, sait mieux quels produits mettre en avant et avec quels arguments convaincre. En outre, il a désormais toutes les métriques en main pour déterminer la profitabilité directe de ses actions.

A l’ère du consommateur tout-puissant, le marketing prend sa pleine envergure et détient toutes les clés pour doper la croissance d’une entreprise. Si le CMO n’était jusqu’ici pas toujours assis à la table du ComEx, gageons que demain il aura assurément gagné les galons pour le présider.

[1] R. Srinivasan et R. Parrino, CEOs With Marketing Backgrounds : When Are They Appointed And How Well Do Their Firms Perform ?, février 2011

[2] CMO spend survey 2015-2016, Gartner, novembre 2015

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