Faire de la technologie une alliée de la publicité responsable

boumghar

Fer de lance de la société de consommation et carburant de l’économie digitale, la publicité est en première ligne face à la montée des préoccupations environnementales. Sous la pression conjuguée des citoyens, des ONG, des pouvoirs publics et d’une nouvelle génération de collaborateurs engagés, c’est toute la chaîne de valeur des médias qui est incitée à adopter une communication plus responsable. Sur le fond depuis déjà quelques temps (les produits et services qu’elle promeut) et désormais dans les formes (les canaux de communication). Sous peine de discréditer les messages qu’elle véhicule et de subir des réglementations de plus en plus restrictives, la publicité se doit d’agir sans plus attendre pour réduire son impact sur l’environnement.

De fait, les textes actuellement en préparation, comme la loi climat et résilience désormais entre les mains du Sénat, ou la proposition de loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique actuellement en revue à l’Assemblée Nationale, résonnent comme autant de coups de semonce. Consciente de ses responsabilités, mais aussi des enjeux économiques, la profession n’avait pas attendu pour engager un travail collectif sur les questions environnementales, à l’instar des recommandations sur le développement durable de l’ARPP ou du programme FAIRe de l’Union des marques. Quant aux différents acteurs – annonceurs, agences, régies, médias… –, ils sont nombreux à avoir entrepris de muscler leur politique RSE.

Mais aujourd’hui, il faut incontestablement aller plus vite et plus loin que les déclarations d’intention et les chartes de bonne conduite. Pour cela, il est impératif de mettre en place des indicateurs chiffrés tels que l’empreinte carbone d’une campagne sur l’ensemble de ses supports ou l’empreinte carbone d’un média en particulier. En effet, seul ce type de mesure systématique permettra d’objectiver et de comparer les performances, de prioriser les actions et de mesurer les progrès accomplis. En matière de communication responsable, le grand défi pour les acteurs de la publicité est maintenant de passer des promesses aux actes, et du qualitatif au quantitatif.

La difficulté tient bien sûr à la complexité des chaînes de valeur, à la multiplicité des supports et au caractère récent du sujet. Il n’existe que peu de standards sur lesquels s’étalonner, peu de référentiels permettant d’évaluer avec une relative précision la contribution carbone de tel prestataire ou de telle étape du processus. Dans le cas des campagnes digitales, il faut par exemple se pencher sur la création, la production, le stockage, la diffusion (qui représente la part la plus importante) et, enfin, le visionnage. C’est pourquoi il est important de bien délimiter le périmètre des responsabilités de chacun, de favoriser l’échange d’informations entre les acteurs et de créer des référentiels communs, ce à quoi s’attachent actuellement les organisations professionnelles.

Cependant, ce travail prendra du temps et il n’est plus question d’attendre. Si le Gouvernement a fixé l’échéance de la définition d’indicateurs de performance environnementale au 1er janvier 2024, certains annonceurs en font déjà un critère de sélection, que les agences s’attèlent à anticiper. Mais pour aller au bout du chemin, il est indispensable d’être accompagné d’une triple expertise : sur les questions environnementales, pour savoir de quoi l’on parle et disposer de données et de modèles à l’état des connaissances ; sur les métiers de la publicité, pour comprendre les enjeux et envisager des améliorations ou des alternatives pertinentes ; sur la technologie, enfin, car elle est l’outil et le support privilégiés de la publicité autant qu’un instrument de mesure et d’optimisation incontournable.

Dans un environnement complexe et qui manque encore de maturité, la technologie a réellement vocation à être un catalyseur. Par sa rigueur, sa finesse d’analyse, ses possibilités de collaboration et d’automatisation, elle permet de rendre la démarche concrète pour tous les acteurs internes (RSE, métier, technique…), voire externes (clients, prestataires…) en structurant leurs échanges autour de données objectives et partagées. Sur les campagnes digitales en particulier, les acteurs de la publicité ont de nombreux moyens de réaliser des progrès rapides et significatifs ; la technologie leur permet d’identifier ces leviers, de les actionner et d’en connaître les bénéfices.

Pour le secteur de la publicité et des médias, l’enjeu est rien de moins qu’existentiel. S’il n’agit pas dès maintenant pour réduire significativement ses impacts sur l’environnement, il s’expose à perdre de sa crédibilité auprès des annonceurs comme des consommateurs. Déjà sur la sellette, il lui sera alors très difficile de regagner leur confiance.

(Les tribunes publiées sont sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas CB News).

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