Luxe et Retail : le futur des pays du Golfe

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(© Roman Logov, unsplash)

A l’occasion de la présentation de son 7ème livre blanc sur le thème du voyage et du retail de luxe , en partenariat avec Condé Nast Traveller, le groupe Chalhoub, partenaire des marques de luxe au Moyen-Orient depuis 55 ans et expert dans la vente au détail, invitait cette semaine la presse, à venir réfléchir à l’avenir du tourisme aux Emirats Arabes Unis et dans les pays du Gofle. Un moment pour identifier les touristes qui dépensent aujourd’hui et dépenseront demain, au coeur de ces destinations afin d’anticiper leur arrivée pour les acteurs du commerce et du tourisme, dans les vingt prochaines années.

Quelle typologie de touristes se déplace le plus au Moyen-Orient ? Combien est-elle prête à investir pendant sa séance de shopping ? Quels sont ses centres d’intérêts et ses attentes envers le commerce et l’hôtellerie locale ? De quelle façon les entreprises peuvent-elles rendre la région attractive et augmenter la fréquentation régionale ? Peuvent-elles enclencher de bonnes stratégies en matière de retail et de digital ? Tenter le pari de l’éco-tourisme de niche ? C’est sur cette série de questions que Patrick Chalhoub, président directeur général du groupe Chalhoub (acteur de la mode, beauté, art de vivre auprès des marques et présent dans 14 pays du Moyen-Orient avec 8 500 collaborateurs), a débuté sa présentation sur le tourisme et le retail régional, devant  la presse, à Paris. Un ensemble de thématiques qui mettent aujourd’hui en avant la volonté de ces pays, à s’adapter à la mondialisation et à devenir une destination de premier choix. Ce qui n’était pas le cas à la création du groupe à Damas, en Syrie, en 1955 puisque le marché n’avait pas encore été exploité… CB News vous en détaille les enjeux.

Le Moyen-Orient se préparE  à 149 millions d’arrivées dans 20 ans

Si le touriste est captif, inspiré et apte à partager fréquemment ses expériences à ses cercles, le retail doit veiller à lui offrir « tout ce qu’il recherche, comme un choix de collection, des produits uniques, des vitrines inspirantes et des expériences inédites », explique Patrick Chalhoub. Un mot d’ordre qui devra toutefois tenir compte de la croissance du tourisme dans les pays du Golfe au cours des trente prochaines années.  Selon les prévisions United Nations, nous pourrions d'ici là,  être 8,5 milliards de voyageurs à circuler autour du monde et 1,8 milliards de touristes internationaux dans le monde (UNWTO) !  D’ici vingt ans le Moyen- Orient pourrait également comptabiliser 149 millions d’arrivées (plus de 61 millions d’arrivées en 2010 avec une croissance à plus de 145%). Un défi de taille impliquant que tous les acteurs régionaux (tous secteurs confondus), développent des services et des offres alléchantes, aussi bien pour les voyageurs modestes, que portés sur le luxe. A noter que la notion de « luxe », en référence originelle au grand standing, est redéfinie par les voyageurs, eux-mêmes, leurs attentes évoluant constamment.   

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(© Roman Logov, unsplash)

LE dÉfi des globe-trotters connectés  

« L’approche luxe de nos clients est moins formelle qu’auparavant, plus personnelle et affinée en fonction de leurs mentalités et leurs intérêts », décrypte d’ailleurs Candice D’Cruz, vice-présidente marketing et mangement marque de luxe au Moyen-Orient et Afrique pour Mariott International. Une tendance observée par le fait que le globe-trotter est connecté, quel que soit son âge et qu’il se renseigne via les réseaux sociaux avant de rejoindre sa destination, sinon les commerces de son choix (40% des voyageurs MENA recherchent en ligne avant d’acheter offline et 48% des voyageurs se renseignent sur l’offre retail avant de choisir leur destination). Les commerces et les marques ont dont tout intérêt à adapter leur activité en fonction de cette utilisation massive du digital, puisque le taux de pénétration internet aux Emirats Arabes Unis est de 99% et de 98% au Koweït, contre 95% aux Etats-Unis et au Royaume-Uni et de 92% en France et en Italie. L’utilisation d’Instagram elle, bat les records : 63 millions l’utilisent, rien qu’au Moyen-Orient (ZDNet). Rien d’affolant pour les retailers et les fournisseurs de services de luxe, toujours à la recherche de nouvelles opportunités et de nouveaux concepts à développer. Ils savent d’ailleurs que le shopping, est la raison phare de voyager pour 20% des passagers. Et que 13% des visiteurs viennent à Dubaï principalement pour y effectuer des achats (chiffres de 2018 du département tourisme et commerce de Dubaï). Par conséquent, les spécialistes ne perdent pas de temps : ils développent des plateformes facilitant les transactions et des tarifications géographiques.

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(© Dariusz Sankowski, unsplash)

Le duty free et les shopping festivals, premières vitrines stratégiques 

Tout commence par le duty free à l’aéroport, la première porte d’entrée des touristes, tentés d’acheter des produits locaux, limités, sinon compris dans des offres uniques et alléchantes. Un point de passage qui, à Dubaï comptabilise 89 millions de passagers, faisant de cette zone la plus fréquentée du monde (pour son trafic international). Dans le détail, pas moins de 15 millions de passagers y ont transité en 2018. Enfin, 40% de voyageurs y effectuent un achat (cosmétique, tabac, mode haut de gamme et aliments). Et 33% des ventes totales concernent des produits de luxe de ce même duty free pour l’année 2018 (680 millions de dollars selon les sources de l’aéroport international).

Côté prévisions, l’activité devrait augmenter d’ici 10 ans, prévoyant le trafic de 135 millions de passagers en transit autour de 7 432 m2 d’espace de vente au détail. La ville et les pays du GCC misent également sur les « shopping festivals », opérations qui ont permis sur l’année passée d’avoir un taux de +60% de clients étrangers. Même stratégie pour « Shop Bahrain » et le « Hala Kuwait festival ». Troisième attraction préférée des touristes et d’intérêt international, les parcs d’attractions (Resorts, Atlantis Aquaventure Park, Warner Bros, Ferrari World, etc…) et les sites sportifs : L’expo 2020, le Grand Prix de Formule 1 d’Abou Dhabi Saudi, la Coupe du Monde FIFA 2022 au Qatar et les sites culturels tels que le King Abdulaziz World Cultural Centre.

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(© Sofy M. | halftoneco, Unsplash)

A cela s’ajoute  le tourisme culturel et religieux (pèlerinages) avec des sites phares : Le Louvre Abou Dhabi et d’autres sites en construction, le Royal Opera House à Oman, ou encore le centre culturel du Koweït, Sheikh Abdullah Al Salem. En Arabie Saoudite (ayant accueilli 19 millions de touristes internationaux et du Golfe lors du Hajj and Umrah en 2018 avec 15 millions d’ici 2030 et 30 millions en 2030), les visites augmentent à la Grande Mosquée (5,8 millions de visiteurs en 2017). Côté profil de voyageurs intéressés par ces activités et Dubaï de manière générale, une grande majorité de millenials chinois (avec 3 millions de visiteurs chinois passés par cet aéroport en 2018).

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(© Junhan Foong, unsplash)

Le défi de l’investissement dans le tourisme

Le trafic ayant augmenté, investir dans le tourisme est devenu la priorité des gouvernements et des institutions : chacun bouscule ses codes et sa politique pour devenir flexible et se préparer au mieux au tourisme de masse (et renforcer son économie). Au Koweït, le tourisme contribue à 5,6% du PIB total et 4,3 millions d’arrivées internationales sont attendues d’ici 2020. Quant à l’Arabie Saoudite, elle prévoit d’investir 45 milliards dans le tourisme pour accueillir 30 millions de visiteurs internationaux d’ici 2030, qui bénéficieront alors de procédures administratives simplifiées (visas électroniques  disponibles sous 24 heures).

La fierté nationale est forte à Oman également puisque les investissements actuels, dans cette même optique de prévoyance, ont atteint  650 millions de dollars. Au Bahreïn, la capacité aéroportuaire atteindra 14 millions de passagers annuels et les investissements dans l’aménagement de l’aéroport sont colossaux : 1,1 millards de dollars dans le but d’achever le projet d’ici 2020. Enfin, aux Emirats Arabes Unis, accueillant principalement des indiens, des britanniques et des chinois, 25 millions de visiteurs sont attendus d’ici 2025. C’est sans oublier les saoudiens (qui ont dépensé en 2017 26 milliards de dollars). Une situation inédite dont profitent déjà les fournisseurs de biens et de services, notamment l’hôtellerie, de plus en plus pérenne et « bien pensée » pour satisfaire les bénéficiaires.

 

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(© freestocks)

Voyages pro ou perso, l’hôtellerie luxe devient plus accessible

Dans cette partie du globe, les opportunités d’affaires dans des cadres privilégiés et de haut standing ne manquent pas. Salons, colloques, venues d’investisseurs, sites événementiels, chaque entreprise ou hôtel y met du sien pour répondre aux attentes des professionnels et des particuliers. Le tourisme responsable séduit de plus en plus avec ses politiques écologiques (croisières vers des sites d’exception  sur la côté d’Oman par exemple avec +7% de croissance en 2018 vs 2017), quant au secteur de l’hôtellerie, il élargit ses gammes pour les rendre accessibles à tous. Tout particulièrement celui des Emirats Arabes Unis, qui se voit leader au GCC dans ce secteur et plus particulièrement en luxe, jusqu’en 2022. Les stratégies sont simples : l’offre est adaptée au lieu et l’expérience passe avant le produit. « Il ne suffit pas de promouvoir la marque, il faut aussi promouvoir la destination », précise Patrick Chalhoub. Ainsi, divers sites proposent des packages (4 nuits classiques et une deluxe) pour attirer les voyageurs aux budgets modestes, sinon lancent des solutions éco-touristiques. Le sur-mesure est donc l’atout phare pour attirer la clientèle.

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(© Jihong Shim, unsplash)

Tout miser sur les concepts stores

Côté commerce et retail, à l’heure où les touristes comparent tous les prix et s’intéressent à l’univers du luxe en étant beaucoup plus jeunes,  les commerçants doivent se montrer compétitifs. L’heure est aux concepts stores inédits et aux magasins d’ « expériences ». La clé pour y parvenir ? «  Créer de la différenciation, éditer des produits personnalisés, qui attirent la clientèle locale mais pas seulement.  Travailler la calligraphie par exemple mais surtout, identifier le profil de clientèle », ajoute le président de Chalhoub Groupe.  Connexion émotionnelle entre la marque et le client, profondeur de gamme, astuces pour le rester plus longtemps en boutique, y compris le marketing sensoriel, tout est pensé pour améliorer et fluidifier le parcours client et limiter le temps passé  à la caisse (vendeurs polyglottes, tours operators, etc).

Nombreuses sont les enseignes qui testent par exemple les miroirs digitaux pour simuler le maquillage, les ateliers de chaussures personnalisées (Level Shoes District, 40 boutiques, 9000 m2 ), ou les bar lounge Baccarat pour déguster une boisson dans un verre en cristal, au sein même de la boutique… Tant d’éléments qui ont permis une croissance des produits de luxe de +6%, soit 290 millions de dollars en 2018 (Luxury Good Worlwide Market Study) et une croissance du marché du luxe, en 2018, de +5%, soit 1,34 milliards de dollars. Quant à l’avenir du secteur retail, les prévisions sont optimistes et prévoient une augmentation de 4% : si en 2018 elle était estimée à 253,2 milliards, c’en seront 308 d’ici 2023 (Bain et Altagamma).

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(© Alissa De Leva, unsplash)

Le retail de demain sera digital

Toutefois, pour parvenir à attirer plus de clients, les retailers doivent s’adapter aux nouveaux usages digitaux et commencer à exploiter l’intelligence artificielle. En effet, ceux-ci doivent avoir une bonne connaissance des millenials et autres générations et mettre en place davantage de solutions pour promouvoir le e-commerce. Le tout, en s’adaptant à la taille du marché, en incluant les classes moyennes de touristes et en concevant des dispositifs qui se complètent les uns, les autres.  Ainsi, la transformation des marques et du secteur du luxe, est déjà enclenchée. Que l’on se rassure, la France est et restera toujours, une destination « in » !

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(© William Iven, unsplash)

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