Corinne Mrejen (Les Echos-Le Parisien) : "Personne ne gagnera dans un monde qui perd"

Corinne Mrejen

Avant la conférence Impact, ce mardi à l’Institut du Monde Arabe, Corinne Mrejen, directrice générale du groupe Les Echos-Le Parisien, pôle Les Echos Le Parisien Partenaires, revient sur les grands enjeux RSE de son groupe.

CB News : Impact est le titre de la conférence organisée par CB News dont vous êtes partenaire. Pour le groupe Les Echos- Le Parisien, ce nom est celui donné à la gouvernance dédiée aux sujets de la RSE : le Comité Impact. Comment est-il constitué et quelle est sa feuille de route en 2022 ? 

Corinne Mrejen : Notre comité impact est un élément-clé de la gouvernance dédiée à l’engagement responsable du groupe, mise en place au moment de l’énonciation de notre raison d’être (« s’engager à favoriser l’émergence d’une nouvelle société responsable, en informant, mobilisant et accompagnant chaque jour les citoyens et les entreprises »). Composé des membres du Comex et d’un référent de chaque activité, il permet d’avancer sur notre trajectoire, aussi bien sur le plan stratégique qu’opérationnel. Il est le garant de l’accomplissement de nos engagements. Cette gouvernance dédiée établit des points de contacts récurrents avec les parties prenantes internes et externes du groupe : les collaborateurs (à travers des moments de partage pour fédérer autour de cette démarche), les publics (à travers une communication régulière en direction des lecteurs, des abonnés et participants aux événements) et les fournisseurs (à travers une stratégie climat et une politique d’achats responsables). Notre feuille de route est claire, robuste et opposable. Deux lignes de force la composent : « montrer le chemin » pour accompagner nos lecteurs dans leur prise de conscience et leur capacité à passer à l’action ; et « montrer l’exemple », c’est-à-dire améliorer nos propres pratiques sociales et environnementales (stratégie carbone, parité, égalité…). Chaque activité a sa feuille de route. Au total, 51 actions ont été identifiées et jalonnées sur 1 à 3 ans. Elles sont monitorées grâce au suivi de 130 indicateurs.

CB News : La publicité doit, elle-aussi, répondre à ces enjeux de responsabilité et de durabilité. Des espaces publicitaires dédiés et « de grands programmes de communication autour de la durabilité » ont vu le jour à l’initiative de Les Echos Le Parisien Media. Comment les annonceurs s’en sont-ils saisis ?

Corinne Mrejen : La démarche du Groupe est globale et irrigue l’ensemble des activités et équipes du groupe. Dans ce contexte, la régie publicitaire se donne pour cap de faire de la communication un levier efficace de la transition écologique et solidaire.  Être utile et avoir de l’impact s’exerce concrètement à différents niveaux. Le premier, agir du côté de l’offre proposée à nos annonceurs et favoriser les bonnes pratiques de communication responsable. Le deuxième, les accompagner dans leur communication sur leur responsabilité et utilité sociétale. Pour ce faire, le format le plus adapté (et le plus ambitieux) est celui des Grands Programmes de Communication. Un Grand Programme de communication a vocation de permettre aux entreprises de s’associer à des thématiques structurantes en activant media, contenu et événementiel. Un format au long court particulièrement adapté à une prise de parole sur l’utilité sociale d’une entreprise, sa valeur contributive. C’est aussi l’opportunité de valoriser une nouvelle perception, plus authentique, de la marque ou de l’entreprise auprès des consommateurs/citoyens. L’opération « Planète Action » avec Axa - placée sous l’égide du Ministère de l'Education nationale, de la jeunesse et des sports - est à ce titre un bel exemple de Grand Programme. Son intention est d’engager positivement la nouvelle génération vers une économie responsable. Dans ce dispositif très « terrain », des personnalités engagées reviennent dans leurs lycées pour engager le dialogue avec les jeunes et les inviter à devenir eux-mêmes porteurs de projets à impact. En parallèle, un écosystème rédactionnel dans Les Echos et Le Parisien vient enrichir cette thématique passionnante. Nous aurons l’occasion de revenir sur cette initiative lors de la conférence Impact.

CB News : Vous avez annoncé la création d’un fonds publicitaire solidaire pour permettre à de jeunes entreprises engagées de bénéficier gratuitement d’une campagne de communication dans les médias du Groupe. Comment fonctionnera-t-il ?

Corinne Mrejen : L’idée sous-jacente à la création de ce fonds est que notre Groupe, par sa force de frappe, peut favoriser les initiatives qui impactent positivement la société et surtout leur permettre de « passer à l’échelle ». Son montant global est lié au chiffre d’affaires généré par des campagnes publicitaires responsables sur l’ensemble des supports du Groupe. Ainsi, plus les annonceurs communiquent sur leurs engagements RSE, plus ils contribuent à alimenter ce fonds, sans budget supplémentaire de leur part. Nous allons accompagner 6 startups cette année. Pour ce faire, nous nous appuyons sur deux partenaires experts afin de sourcer les projets : le 10G, le nouvel accélérateur du Parisien et makesense, incubateur et accélérateur de projets à impact positif.

CB News : « Beaucoup de firmes ont tendance à n'engager que les actions qui servent leur propre intérêt » dénonçaient Philippe Naccache et Julien Pillot dans vos colonnes, comment éviter cet écueil ?

Corinne Mrejen : Personne ne gagnera dans un monde qui perd. Il s’agit avant tout d’agir, de contribuer chacun à sa mesure, à sa façon, aux transitions. La nécessité de coopérer autour de nos intérêts communs (un climat vivable, des sociétés plus égalitaires…) relativise la notion de concurrence. J’entends le fait de revenir à la conception véritable de la responsabilité sociale des entreprises : le système de production a un impact sur les sociétés et l’environnement ; il faut en prendre conscience et repenser nos activités pour rendre le système plus résilient. Eva Sadoun* souligne le fait qu’on retienne d’Adam Smith sa théorie, issue de La Richesse des Nations, selon laquelle nos choix individualistes mèneraient in fine à la richesse. Mais elle rappelle qu’on oublie souvent sa Théorie des sentiments moraux, une des œuvres dont il était le plus fier, dans laquelle il érige l’empathie et la coopération en tant que valeurs fondamentales et structurantes des rapports humains, capables de réguler les organisations sociales. Ce qui m’apparaît central, c’est la notion de coopération. Il faut « faire ensemble » pour amener un changement majeur, pour changer d’échelle.

CB News : #inspiration Quelle est la dernière initiative RSE que vous avez trouvé remarquable ?

Corinne Mrejen : Les initiatives fleurissent dans tous les secteurs de l’économie, c’est très enthousiasmant. Les Echos et Le Parisien y consacrent de nombreux papiers (newsletter Good Economie, Les Echos Planète, Le Parisien Economie, Le Parisien Ma Terre). Je trouve difficile d’en choisir une, mais j’ai beaucoup d’admiration pour les acteurs à impact « natifs » des transitions et de l’engagement, c’est-à-dire des femmes et des hommes qui se sont lancés dès de départ dans des projets ayant vocation à changer le monde.  Je pense par exemple aux fondateurs de ChangeNOW le sommet de l’innovation à impact qui se tiendra du 19 au 21 mai prochain (dont le Groupe Les Echos-Le Parisien est actionnaire). Leurs parcours et leur état d’esprit sont très inspirants. Ils évoluent dans un monde d’innovation, de coopération et de contribution. La rencontre entre cet univers et le Groupe Les Echos Le Parisien, fort de son expertise, de sa puissance, de sa capacité à toucher de larges audiences… est très fertile et surtout efficace pour accompagner le passage à l’échelle.

*Eva Sadoun, entrepreneuse et co-présidente du Mouvement Impact France dans Une économie à nous

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