Et si le Metavers avalait Google et Amazon ?

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Irréaliste ? Le Metavers pourrait être un coup génial pour Facebook face à Google et Amazon.

En effet, dans l’Internet actuel, l’interface universelle est toujours le sacro sain navigateur…et un clavier. Il y a l’accès vocal, mais il reste pour l’instant minoritaire et plus marginal qu’annoncé. Parmi les limites qui freinent son utilisation, il y a la nécessité impérieuse, pour beaucoup de requêtes, d’un dispositif d’affichage. Pour voir la photo de Daniel Craig, je peux poser la question oralement mais j’ai besoin de VOIR le résultat.

L’affichage justement. Les deux tiers du trafic sont mobiles. Ce qui signifie que quelle que soit la recherche, l’essentiel des restitutions se fait aujourd’hui sur quelques cm2 ! Et cela ne va pas changer rapidement avec le confort croissant fournit par la 5G qui va encourager l’usage mobile.

Un dispositif d’immersion qui redonne un espace de visualisation plus large sans embarquer un gros machin (des lunettes ?) pourrait devenir un nouveau standard de l’accès Web mais il y a beaucoup de « si » derrière ça : si l’usage est fluide, si l’adoption des technos se vérifie (à l’heure actuelle la VR est un peu « en panne ») etc.

En se penchant sur le business actuel des GAFAM, trois éléments sautent aux yeux :

Tout d’abord, ils se construisent tous un « walled garden » où ils sont seuls à bénéficier de la data liée au comportement de l’internaute car chacun a utilisé… son navigateur ! Apple a mis en place ATT et tue les cookies tiers dans SAFARI et Google a annoncé leur disparition dans Chrome d’ici un an. Celui qui maîtrise le navigateur est quasiment omnipotent.

Ensuite, ils ont instauré un « droit de passage » entre l’internaute et l’annonceur. Google a réussi ainsi à devenir « le péage de l’autoroute » de la recherche sur internet. Si un consommateur cherche une paire de Nike et clique sur une annonce payante ou dans une video YouTube - second moteur mondial qui appartient à Google - il arrive chez un annonceur qui a payé Google pour cela. Idem avec Amazon. Aux US, 54% des requêtes produits passent à présent par Amazon, lequel a intermedié des e-commercants et marketplaces qui paient pour accéder au client.

Enfin, le business de Google est d’organiser la rareté dans l’espace de l’écran. Récemment, le moteur, en grossissant fortement ses vignettes Shopping, a poussé les résultats naturels vers le bas et la part du trafic naturel de nombreux e-commercants a lourdement chuté. Plus l’écran est petit, plus Google priorise les résultats payants, et plus les annonceurs se battent pour les meilleurs places, ce qui fait grimper les prix.

Si le Metavers devenait une interface universelle, il serait le « navigateur » de Facebook.

En chaussant un casque, l’utilisateur entrerait dans un monde où, en tournant la tête, il accèderait à un espace visuel immense, avec par exemple des écrans géants façon Time Square. Terminés l’écran ridicule du téléphone et l’espace rare ! Et ce serait Facebook qui louerait tout cet espace. Un sale coup pour les business d’intermédiation aux enchères comme ceux de Google ou Amazon.

Dans cette configuration, si l’utilisateur souhaite aller dans Google ou Amazon dans le Metavers, Facebook le saura puisque ça se passe dans son monde. Meta aura « inclus » ses concurrents en quelque sorte avec une data sur l’utilisateur que n’auront pas les autres. C’est lui qui devient le péage de l’autoroute.

D’autant que – même si c’est loin d’être réalisé – il faut se souvenir que le fantasme de Marc Zuckerberg est la télépathie ; pouvoir « parler » en français à un chinois avec son esprit et que lui « entende » directement en chinois. Celle-ci résoudrait pas mal de problèmes : Les langues mais aussi la nécessité du clavier, du clic de souris. Parmi les raisons d’échecs antérieurs (Google Glasses, Hololens…) figurait la difficulté d’interagir avec ces outils. Si nous pouvions tout faire avec le cerveau…

Pour finir, l’ambition de Meta est clairement de devenir un espace commercial avec une  capacité d’échange monétaire. Facebook a déjà une monnaie. Si ça marche, Meta aura construit un monde complet comme Wechat. Zuckerberg envisage même d’y faire crédit. Il a de fortes chances que les gouvernants américains favorisent une telle initiative face à la Chine et à ses velléités de Yuan digital.

Qu’est ce qui peut rater ?

Quand les géants du numériques veulent freiner une initiative ils se débrouillent pour ne pas être compatible. Si Google refuse d’être intégrable dans Meta, l’internaute sera obligé d’en sortir pour faire une recherche, à moins que Facebook établisse un partenariat avec Bing ?

Voyant son trafic diminuer, Google serait contraint de faire machine arrière pour ne pas perdre de business.

Ou alors l’expérience utilisateur sera mauvaise, et à part les early adopters, le reste du monde continuera à dire « dis, Siri » ou « ok Google » et à utiliser son téléphone. Meta aura dépensé beaucoup d’argent pour rien et ses concurrents trouveront des contre-mesures.

Le nerf de la guerre sera les choix d’investissement marketing des annonceurs bien sûr, mais aussi la capacité de Meta à faire de cet espace transactionnel une machine à cash, très réelle, celle-là.

Les agences et les régies devront apprendre à faire du référencement en 3D dans le Metavers. Pour le payant, ce ne sera jamais qu’un RTB de plus mais pour le naturel…  on verra sur place ! Il est probable cependant que les moyens de chercher ou de s’orienter ne seront plus seulement lexicaux. Il y aura un Waze du Metavers à mettre en place.

Ah… Waze, ça appartient à Google !

(Les tribunes publiées sont sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas CB News).

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