Netflix, j'y vais ou j'y vais pas ? Stéphane Gorre (Agence 79)

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Historiquement, annonceurs et agences média pointent la nécessité, voire l’obligation, de disposer de metrics fiables et transparentes des audiences aussi bien sur le linéaire qu’en ligne. Début novembre 2022, Netflix lançait son offre avec publicité. Le service de streaming, à date, ne communique pas ses données d’audience et, pourtant, bon nombre d’annonceurs se ruent sur ses espaces publicitaires… CB News est parti interroger le marché sur ce qui pourrait ressembler à un étrange paradoxe. C’est « Le débat CB News ». Il propose une série d’interviews des parties prenantes. Après Emmanuel Crego (Values.Media), Bertrand Beaudichon (Initiative) et Riccardo di Mauro (Anacrouse), place aujourd’hui à Stéphane Gorre, fondateur et président d’Agence79.

CB News : Depuis début novembre 2022, Netflix propose une offre avec Publicité. Une bonne nouvelle pour les agences média ?

Stéphane Gorre : L’arrivée de Netflix et Disney + est une excellente nouvelle pour les agences media et notamment les pureplayers. Elle permet de proposer des nouveaux carrefours d’audience, de nouveaux Touch Points aux annonceurs. Cela permet de surcroît de réaliser des campagnes vidéo à l’heure où les écrans TV sont saturés avec, en principe, une excellente capacité de ciblage et de mesure. De son côté, Netflix n’avait pas manqué de souligner son ambition de bouleverser le marché avant le lancement de son offre en novembre dernier. Pour autant, de nombreuses interrogations demeurent aujourd’hui en suspens…

CB News : Conseillez-vous à vos clients d’y investir publicitairement ?

Stéphane Gorre : L’offre intégrant la publicité de Netflix est facturée 5,99€ aux utilisateurs. On peut donc en premier lieu s’interroger sur le nombre d’abonnés qui vont y souscrire mais aussi sur leur typologie. Avec une typologie de souscripteurs qui se veut probablement moins CSP+ que sur l’offre premium, la première question à se poser consiste à savoir si ces derniers correspondent bien aux cibles de nos annonceurs. A noter aussi, des CPM très élevés, à savoir 49€ pour un spot de 30 secondes et 39€ pour un spot de 15 secondes. D’autre part, les volumes d’impressions servis sont bien en dessous de ce que l’on pouvait attendre suite à leurs propositions, et ce même sur des tickets d’entrée très restreints. Au regard de l’ensemble de ces éléments ne pouvons donc conseiller à l’ensemble de nos clients de réaliser des campagnes sur la plateforme. Notons enfin qu'aucun segment de ciblage n’est proposé mis à part les catégories de contenus, de devices ainsi que les pays.

CB News : Les agences médias et les annonceurs plaident fortement et depuis longtemps, encore lors des dernières rencontres de l’UDECAM en novembre dernier, pour la mise à disposition de metrics toujours plus fiables et transparentes sur les audiences, aussi bien sur le linéaire qu’en ligne. Netflix n’en communiquent pas. N’y a-t-il pas là un paradoxe un peu gênant pour les agences médias au cœur du réacteur et les annonceurs, voire même un peu d’hypocrisie ?

Stéphane Gorre : Effectivement, c’est bien là que le bât blesse. Nous attendons désormais de la data aussi bien quali que quanti. Il serait de bon ton également que ces données d’audience soient réalisées par un acteur tiers. A date, les seuls paramétrages auxquels nous pouvons avoir accès ne sont autres que le capping, le pays, le device et la typologie de contenu. Cela étant, je tiens à souligner que l’offre est naissante et il ne semble pas illogique que l’offre puisse se structurer dans le temps. Notons que cette année, la plateforme devrait offrir la possibilité d’utiliser des outils tiers pour s’assurer de la brandsafety et de la bonne qualification des audiences.

CB News : Les clients de l’agence sont-ils moteur dans ce choix d’être présent sur les espaces de Netflix, ou y-a-t-il un rapport de force entre l’agence et son client ?

Stéphane Gorre : Il n’y a pas de rapport de force, bien au contraire. Il y a cependant une curiosité partagée et la conscience que cette offre peut permettre de toucher de nouveaux consommateurs. La seule question que nous nous posons avec nos clients consiste à savoir si l’apport est réel pour lui dans le cadre de son plan media, là réside toute la question.

CB News : Netflix mesuré par Médiamétrie, par exemple, une attente forte de votre part ?

Stéphane Gorre : Bien naturellement, un acteur tiers doit pouvoir certifier les impressions. Notons qu’aujourd’hui, la mesure est moins développée sur Netflix qu’elle ne l’est sur la TV linéaire…

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