Netflix, j’y vais ou j’y vais pas ? Damien de Foucault (UDECAM)

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Historiquement, annonceurs et agences média pointent la nécessité, voire l’obligation, de disposer de metrics fiables et transparentes des audiences aussi bien sur le linéaire qu’en ligne. Début novembre 2022, Netflix lançait son offre avec publicité. Le service de streaming, à date, ne communique pas ses données d’audience et, pourtant, bon nombre d’annonceurs s’essaient à ses espaces publicitaires… CB News est parti interroger le marché sur ce qui pourrait ressembler à un étrange paradoxe. C’est « Le débat CB News ». Il a proposé une série d’interviews des parties prenantes avec les agences média Values.Media, Initiative, Anacrouse, Agence79, Repeat Groupe, CoSpirit Groupe, Publicis Media, Havas Media, OMD et dentsu (voir notre dossier, ici). Aujourd’hui, Damien de Foucault, directeur général de l’Union des entreprises de conseil et d'achat media  (UDECAM).

CB News : Depuis début novembre, Netflix propose une offre avec Publicité. Une bonne nouvelle pour les agences que vous représentez ?

Damien de Foucault : L’arrivée d’un nouvel entrant est toujours une bonne nouvelle. C’est un facteur de dynamisation du marché, ça bouscule, ça remet certains modèles en question, c’est sain.

CB News : Les agences médias et les annonceurs plaident depuis toujours, encore lors des dernières rencontres de l’UDECAM en novembre dernier, pour la mise à disposition de metrics fiables et transparentes sur les audiences, aussi bien sur le linéaire qu’en ligne. Netflix n’en communiquent pas. Et pourtant bon nombre de marques y investissent. N’y a-t-il pas là un paradoxe un peu gênant pour les agences médias au cœur du réacteur et les annonceurs, voire même un peu d’hypocrisie ?

Damien de Foucault : Les rares campagnes qui s’y sont déroulées ont surtout été motivées par la curiosité, à en croire les premiers retours. Je ne crois pas que « nombre de marques » y investissent, comme vous dites, j’ai même plutôt entendu dire que Netflix avait dû rembourser certains annonceurs en raison d’un inventaire publicitaire insuffisant. Même si les stratégies construites par les agences médias sont inspirées par des rationnels très forts, les agences ne peuvent pas être insensibles à la nouveauté. Il y a toujours une prime au premier entrant mais ça n’a qu’un temps.

Il y aurait certes un paradoxe à encourager à investir durablement un média en l’absence de métriques mais là, il convient d’être précis. D’une part, je suppose que Netflix communique des métriques à ses clients (je ne vois pas comment on pourrait acheter un volume de vues publicitaires sans obtenir la preuve qu’elles ont été servies – la « proof of delivery », en quelque sorte). Par ailleurs, si de telles métriques existent, il serait un peu cavalier et présomptueux de prétendre d’emblée qu’elles ne sont pas fiables. Ce qui est regrettable, c’est qu’elles ne soient pas fournies par un tiers mesureur comme la plupart des supports audiovisuels du marché s’y astreignent. Enfin, vous avez raison de préciser que l’UDECAM plaide pour la mise à disposition de métriques fiables et transparentes. Elle ne perd pas une occasion de revendiquer cette nécessité. Et tant qu’à faire, autant que ce tiers soit le même que notre partenaire institutionnel qui mesure déjà la télévision : Médiamétrie.

CB News : L’UDECAM entend-elle donner des « consignes » à ses agences adhérentes en la matière ?

Damien de Foucault : Certainement pas. Vous imaginez ? Si l’UDECAM s’arrogeait le pouvoir de dire quel support mériterait d’être investi au prétexte qu’il bénéficie ou non d’une mesure d’audience ? Dans toutes les mesures d’audience il y a des absents. Ça n’empêche pas les agences média et les marques qu’elles portent, de travailler avec ces acteurs. Ne serait-ce que parce qu’ils peuvent présenter un intérêt tactique à un moment donné. Mais les supports qui se maintiendraient en marge des mesures communes prennent le risque d’être moins souvent choisis, ne serait-ce que parce que, comme disait le prix Nobel de physique, ce qui n’est pas mesuré n’existe pas.

En revanche, l’UDECAM pèsera de tout son poids pour inviter l’ensemble des médias à être mesurés avec le même outil de mesure chaque fois que c’est possible. Et l’UDECAM demandera que cette mesure soit, naturellement, dédupliquée bien sûr (la couverture offerte par un support n’est, en soi, pas très intéressante ; c’est la couverture du plan qui importe).

CB News : Netflix mesuré par Médiamétrie, par exemple, une attente forte de votre part dans un délai court ?

Damien de Foucault : Une attente très forte, bien évidemment. Tout est là : le président de Médiamétrie lui-même a rappelé la volonté de l’institut à nos Rencontres mais également au sein d’autres instances ou canaux de communication, l’institut lui-même a fait récemment des « moves » très intéressants jusqu’au sein de son capital avec l’entrée d’une Telco, Netflix en Angleterre a rejoint le BARB, Les annonceurs et les agences, cela va sans dire, appellent cette mesure de leurs vœux…

Je crois bien que la balle est dans le camp de Netflix.

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